Peut-on utiliser un brouilleur ?

22 mars 20194 min

La légende veut, qu’en 1999, pour finaliser l’achat de Petrofina par Total, les deux parties se soient rencontrées en toute discrétion à bord d’un jet privé. Véritable cage de Faraday, l’avion aurait empêché toute écoute électromagnétique.

Ceci est une légende Alt

Aujourd’hui, pour un budget compris entre 100 et 1 500 euros, des appareils produisent des « zones mortes » pour un résultat comparable. Sauf que leur vente et leur acquisition en France est illégale. En effet, dans la plupart des cas, ces « brouilleurs » (en anglais, Cell phone jammers) sont interdits par la réglementation.

Pourtant jusqu’en 2012, les salles de spectacles pouvaient dans certains cas les utiliser. Selon les articles L.33-3 du code des postes et des communications électroniques, seuls les services de l’État et les forces armées sont autorisés à s’équiper « d’installations radioélectriques rendant inopérants les téléphones mobiles. »

Mais la pratique, loin d’être anodine, s’était pourtant développée dans les lieux de culte, les salles de spectacles… Et même certains lycées. « Lorsque nous prévoyons une réunion importante dans nos locaux, il nous arrive de faire un dépoussiérage ou de brancher les brouilleurs », nous confirmait même, il y a dix ans, le responsable sûreté d’une grande entreprise américaine. Le dépoussiérage consiste en la recherche et l’élimination des appareils d’écoutes électromagnétiques.

Trois types de technologies “brouilleur” disponibles sur internet ou à l’étranger

  • Le brouilleur simple crée une zone morte dans son rayon d’action. Entre 1 et 20 mètres pour les plus petits et de 75 à 1 200 mètres pour les plus gros. Aucun appel ne sera possible, y compris les appels d’urgence. Or la réglementation française l’interdit. Ces appareils peuvent parfois également perturber les autres types de communications (wifi, ondes radios, téléphone DECT…).
  • La deuxième technologie est un brouilleur complété d’un répétiteur qui permet la gestion des appels d’urgence. C’était ces matériels qui équipaient les salles de spectacles et permettaient de bloquer tous les autres appels sans perturber toutes les technologies sans fil.
  • La dernière technologie est la plus évoluée. Il s’agit d’un détecteur d’appel qui brouille les communications dès qu’un appel non autorisé est décelé dans la zone de couverture. Ces appareils sont utilisés dans les maisons d’arrêt.

Jusqu’à 6 mois de prison et 30 000 euros d’amende

La mise en place d’un brouillage peut être rapidement identifié par les opérateurs téléphoniques. Ces derniers, s’ils le souhaitent, peuvent prévenir l’ANFR, l’Agence nationale des fréquences. En effet, comme le précisait l’ANFR en 2015 :

« L’Arcep, alors Autorité de régulation des télécommunications [en 2012], avait précisé les conditions techniques d’utilisation de ces dispositifs, afin de s’assurer notamment que les perturbations soient circonscrites aux établissements concernés et que les valeurs limites d’exposition du public aux champs électromagnétiques soient respectées.

En dehors de ces cas, la commercialisation et l’installation de brouilleurs était interdite et punie de six mois d’emprisonnement et 30 000 € d’amende.

Afin de lutter contre les brouillages préjudiciables résultant notamment de la vente de brouilleurs sur internet, la réglementation sur l’utilisation des brouilleurs a été renforcée, à l’instar de celles de la majorité des États membres de l’Union européenne qui en interdisent l’utilisation.

Ainsi l’ordonnance n° 2011-1012 du 24 août 2011 relative aux communications électroniques qui transpose en droit interne les deux directives du paquet télécom de 2009 a établi à l’article L.33-3-1 du code des postes et des communications électroniques, à compter du 1er février 2012, une interdiction générale de publicité, d’importation et mise en circulation, de vente et d’installation, détention ou utilisation de tous les brouilleurs et pour tous types de communications. 

Par dérogation, les établissements pénitentiaires peuvent continuer à utiliser des brouilleurs. Et il en est de même pour les besoins de l’ordre public, de la défense et de la sécurité nationale, ainsi que pour le service public de la justice, de manière générale.

Les salles de spectacles bénéficient d’une période de transition pendant laquelle elles peuvent continuer à utiliser les dispositifs déjà installés. Et ce jusqu’au 31 janvier 2017. Elles ne peuvent toutefois pas en installer de nouveaux. »

Le brouilleur porteur d’ondes nuisibles pour l’homme ?

Enfin, dernier risque, les brouilleurs, à partir du moment où ils sont enclenchés, émettent en continu des ondes électromagnétiques. Des ondes dont on ne sait toujours pas aujourd’hui si elles sont nuisibles pour l’homme.

David Kapp, journaliste

David Kapp – Journaliste

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