Malveillance ordinaire dans les installations industrielles
L’événement de l’été 2015 à Saint-Quentin-Fallavier en est une terrible illustration : les installations industrielles peuvent être utilisées comme des armes. Cependant, la malveillance ciblant le monde industriel ne prend pas uniquement la forme d’actes de terrorisme.
De nombreux accidents trouvent leur origine dans une autre forme de malveillance, qualifiable d’« ordinaire », mais dont les conséquences peuvent être considérables.
Publié en février 2016, dans le numéro 520 de Face au Risque, cet article reste d’actualité en 2019.
En raison des biens et produits qu’ils manipulent ou des nuisances qu’ils génèrent, les sites industriels ont toujours été des cibles de choix pour les personnes mal intentionnées. Globalement, pas moins de 4 % des accidents survenus dans des installations industrielles françaises depuis 1992 et enregistrés dans Aria (la base de données du Barpi¹) sont imputés à un acte malveillant avéré ou supposé.
Plus de trois de ces accidents sur quatre (77 %) impliquent un incendie. Outre les cas où la mise à feu volontaire constitue le but premier, les cambriolages se soldent souvent par des incendies lorsque les malfaiteurs cherchent à dissimuler les traces de leur passage. Environ une fois sur deux, il y a pollution de l’environnement. Il s’agit soit de rejets volontaires de matières dangereuses ou polluantes dans le milieu naturel. Soit d’émissions de fumées d’incendies. Lorsqu’il y a pollution, les atteintes à l’environnement concernent l’air dans environ 60 % des cas. Les eaux superficielles ou souterraines dans 30 % des cas. Et les sols dans 20 % des cas.
Plus de 4 fois sur 5, ces événements ont également des conséquences économiques pour l’entreprise : dommages entraînant des travaux de réparation parfois très lourds, pertes d’exploitation, chômage technique…
Les cibles privilégiées des malfaiteurs
Les malfaiteurs ont des motivations variées qui les conduisent à agresser ou à s’introduire dans des installations de divers secteurs d’activités. Les commerces de gros ou de détail (garages automobiles, centres commerciaux, stations-service…) ainsi que les entrepôts de marchandises constituent des cibles privilégiées et représentent un quart des installations attaquées.
Caractéristiques des accidents liés à la malveillance par secteurs d’activité
Source : Rapport Barpi (« Éléments d’accidentologie sur les actes de malveillance dans les installations industrielles »).
En deuxième position des cibles favorites se trouvent les installations de collecte et de traitement des déchets. Plus spécialement, les sites possédant des stockages extérieurs ou peu sécurisés : centres de tri, déchetteries, installations de stockage, plateformes de compostage… De tels sites sont bien plus vulnérables que les centres de traitement des déchets, comme les usines d’incinération, qui bénéficient d’une meilleure sécurisation. Globalement, 9 % des accidents impactant les activités de gestion des déchets sont liés à la malveillance. Bien plus que pour les autres secteurs !
En troisième place sur le podium, avec environ un quart des attaques, se trouvent les installations de fabrication-transformation. Industries chimiques, agroalimentaires et manufactures de produits métalliques sont les plus ciblées de cette catégorie.
Vulnérabilités révélées par les accidents : des pistes pour éviter les récidives
Qu’elles soient victimes d’un incendie criminel, d’un cambriolage ou d’un déversement volontaire de substance polluante, les installations industrielles prises pour cibles ont en commun des vulnérabilités dans leurs systèmes de protection. Vulnérabilités dont des personnes mal intentionnées savent tirer profit. À retenir parmi ces défaillances récurrentes :
À chacune de ces vulnérabilités correspondent des mesures préventives, techniques ou organisationnelles. Leur mise en œuvre doit permettre de progresser vers plus de sûreté pour les installations industrielles.
Des moyens d’action et traces de passages reconnaissables
En fonction de l’installation ciblée et de la motivation des malfaiteurs, les moyens employés diffèrent. S’ils restent généralement simples, ils se révèlent fort « efficaces ». Quelques exemples :
Ces méthodes laissent derrière elles des indices et traces fort utiles au moment de l’enquête (portails fracturés, clôtures découpées, objets incendiaires tels que des bidons d’essence vides laissés sur place…).
Des éléments tels que la présence de foyers d’incendie multiples et simultanés ou encore la découverte d’une réserve d’eau incendie préalablement vidée permettent également d’exclure une origine accidentelle.
Retrouvez la synthèse complète du Barpi à ce sujet sur le lien suivant : « Accidentologie sur les actes de malveillance dans les installations industrielles ».
¹Barpi : Bureau d’analyse des risques et des pollutions industriels du ministère de la Transition écologique et solidaire.
Pauline Arama
Chargée de mission chimie fine, pharmacie, pyrotechnie, déchets, impacts sanitaires, webmestre du site internet ARIA.
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