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LyondellBasell panse encore les plaies de l’incendie de Berre-l’Étang
Le 14 juillet 2015, le site pétrochimique LyondellBasell de Berre-l’Étang est victime d’un acte malveillant menant à l’incendie de deux cuves de produits chimiques. Si les pistes terroristes puis internes sont tour à tour écartées, c’en est finalement une autre, plus inattendue, qui mène les enquêteurs vers un étrange suspect.
L’incendie maîtrisé, la thèse de l’accident est très vite écartée par les enquêteurs après la découverte d’engins explosifs. Le contexte d’alors – quelques mois après l’attaque de Charlie Hebdo et de l’Hyper Cacher – oriente rapidement l’enquête sur la piste terroriste. Est également étudiée la possibilité de la vengeance d’un salarié ou ex-salarié, la situation sociale du site étant en effet tendue à l’époque : la fermeture de la raffinerie en 2014 avait conduit au blocage de l’usine en 2011 et à plusieurs suppressions de postes.
Des motivations floues
C’est finalement un homme qui n’a jamais travaillé chez LyondellBasell et qui ne répondait apparemment à aucune motivation terroriste qui aurait agi. Le suspect a, au contraire, déclaré vouloir, par ce geste, alerter la France sur le positionnement de certains États étrangers. Des motivations encore floues, donc.
L’arrestation du suspect a eu lieu en juin 2016, après près d’un an d’enquête. C’est seulement après avoir entendu les 4 000 salariés du site que la piste interne a été écartée. Les enquêteurs se sont ensuite intéressés à un des dispositifs de mise à feu défaillant, retrouvé sur les lieux et qui était destiné à faire sauter une troisième cuve. L’engin étant constitué d’éléments assez classiques, les enquêteurs ont dû éplucher des milliers de tickets de caisse pour retrouver l’acheteur de tels produits… Et c’est finalement une toute autre affaire qui a mené à l’arrestation du suspect : des explosions de distributeurs de billets dont l’homme se serait également rendu coupable. C’est pendant sa garde à vue que l’affaire LyondellBasell aurait été évoquée. Tout comme d’autres explosions, notamment celle des salaisons Chambost à Tarare (Rhône) dont il aurait avoué être l’auteur. Artificier de formation, cet homme avait jusqu’à présent un casier judiciaire vierge. Il a été mis en détention provisoire en attendant le procès.
Renforcer la protection des sites Seveso
Cet événement a néanmoins permis d’alerter sur les faiblesses des sites Seveso face au risque terroriste. Il faut dire que l’incendie survient dans la foulée d’un événement plus sinistre, la décapitation d’un chef d’entreprise et la tentative d’attentat sur le site d’Air Products à Saint- Quentin-Fallavier (26 juin 2015). Immédiatement après l’incendie de Berre-l’Étang, le ministère de l’Intérieur a ordonné un audit des installations sensibles. Des milliers d’audits ont donc été réalisés par policiers et gendarmes sur l’ensemble du territoire. L’objectif était de vérifier minutieusement l’enceinte des sites ainsi que leur système de vidéosurveillance.
Coopération entre sécurité publique et privée
Le site LyondellBasell de Berre l’Étang, plus particulièrement, va faire l’objet d’une coopération de sécurité entre les forces de l’ordre, les autorités locales et des sociétés de sécurité privée. Ce dispositif lancé en 2016 par le ministère de l’Intérieur vise à mieux protéger les sites vulnérables, notamment face à la menace terroriste. Ainsi, une convention locale de coopération de sécurité a été signée en juin 2017 entre la préfecture de Police des Bouches-du-Rhône, la mairie de Berre-l’Étang et différentes entreprises de sécurité privée. Cette convention prévoit la mise en place d’un référent pour chacun des signataires, la sensibilisation des acteurs privés à la sûreté du site et le renforcement d’échanges d’informations entre les différents acteurs concernés. Un accord entre la préfecture, la mairie et des sociétés privées parviendra-t-il à sécuriser ce site de 1 000 hectares ?
600 dollars le mètre cube
Malgré les 18 kilomètres de clôtures que compte le site, l’acte de malveillance, par la dépose d’engins explosifs, a pu être réalisé. Après l’incendie, les deux cuves qui ont pris feu n’étaient plus étanches. Conséquences : des composés volatils d’hydrocarbures se sont échappés dans l’atmosphère pendant plusieurs jours, le temps que le site industriel réussisse à renforcer et à vidanger les deux cuves en question. Au-delà de la sécurité des salariés et des riverains, LyondellBasell a tout intérêt à renforcer la sûreté de son site. Interrogée par nos soins, l’entreprise n’a pas souhaité apporter de commentaires. Le renfort de la sécurité est aussi un enjeu économique. En effet, le naphta, contenu dans la deuxième cuve, coûtait à l’époque environ 600 dollars le mètre cube. La cuve incendiée pouvait en contenir jusqu’à 48 000 m³… Heureusement, les pompiers ont permis que l’ensemble de la cuve ne parte pas en fumée.
Ève Mennesson
Journaliste
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