Pollution par boues rouges en Hongrie

1 octobre 20244 min

Il est près de 12 h 30, le 4 octobre 2010, lorsque cède le mur d’enceinte du bassin de stockage n°10 de l’usine de bauxite-aluminium MAL d’Ajka (Hongrie). Près d’un million de mètres cubes de boues rouges, toxiques, sont libérés et se déversent en torrent sur plusieurs villages. Le bilan de la catastrophe sera de 10 morts et plus de 200 blessés.

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Les boues, qui contiennent des métaux lourds, et les eaux très alcalines issues du process pour le traitement de la bauxite, arrivent vers 18 h dans la rivière Marcal qui voit rapidement son pH s’élever dangereusement. La rivière se jetant plus en aval dans un affluent du Danube fait craindre aux autorités la pollution du fleuve. Elles alertent tous les pays du bassin du Danube.

Le lendemain, l’état d’urgence est déclaré dans trois départements de l’ouest du pays. Les dommages sont immenses. Sept personnes sont portées disparues, plus d’une centaine sont blessées. Des centaines d’hectares sont pollués. C’est la plus grande catastrophe écologique qu’ait connue la Hongrie, annonce le secrétaire d’État chargé de l’environnement.

Préserver le Danube

Afin de réduire le pH très élevé de l’eau de la Marcal, mesuré à 13 (le pH neutre est à 7), et de diminuer la pollution, du gypse est répandu dans plusieurs villages et dans la rivière. Des barrages fluviaux sont installés pour stopper les éléments contaminants les plus denses. Puis une neutralisation à l’acide acétique est effectuée en fin de course de la rivière.

Lorsque, le 8 octobre, les boues rouges atteignent le Danube, la qualité de l’eau ne présente plus de danger, selon les autorités hongroises – ce que conteste Greenpeace qui a effectué des prélèvements. Mais les boues ont tué l’ensemble de la faune et de la flore de la Marcal et pollué fortement une autre rivière en amont du Danube.

Métaux lourds dans les boues

Le 9 octobre 2010, une nouvelle fissure est détectée sur le mur du bassin et la population de plusieurs villages est évacuée. En urgence une nouvelle digue, de 5 mètres de haut et 400 m de long, est construite en 48 heures.

Le bilan de la catastrophe est porté à 10 morts et plus de 200 blessés, la plupart par brûlures causées par le pH très élevé généré par l’eau alcaline mélangée aux boues rouges toxiques.

Le 13 octobre, l’OMS (Organisation mondiale de la santé) missionne une expertise pour évaluer les impacts sanitaires à long terme de l’accident. En effet, les métaux lourds présents dans les boues s’accumulent dans les organismes et peuvent être responsables, à long terme, de problèmes de comportement, de développement et de reproduction.

Les causes de l’accident

Les fortes précipitations qu’a connues la région en 2010 sont l’une des causes de l’accident. « L’immense quantité de pluie tombée sur la boue rouge du réservoir 10 a augmenté la pression exercée sur le mur d’enceinte, ce qui a accéléré le processus d’érosion de la digue et a fini par provoquer une fissure sur le mur », analyse le Barpi dans la fiche Aria n° 39047.

Par ailleurs, l’ONG WWF a diffusé des photos aériennes prises trois mois avant l’accident qui montrent des traces de fuites de boues et de déstabilisation du mur. Ceci met en exergue les négligences de la direction de l’usine.

Le procès

En 2016, un premier jugement ne reconnaît pas la responsabilité de l’ex-directeur de l’usine et de son adjoint, et les relaxe. Mais un procès en appel rend un nouveau verdict le 4 février 2019. L’ancien directeur est condamné à deux ans et demi de prison ferme et son adjoint à deux ans. Sept autres prévenus écopent de peines avec sursis. Tous sont reconnus responsables d’homicides par négligence et d’atteinte aux biens publics et à l’environnement.

L’État hongrois, qui était chargé de vérifier les installations de l’usine et qui délivrait les permis de fonctionnement, n’est pas inquiété. En septembre 2011, l’usine MAL avait été condamnée à 500 M€ d’amende par les autorités régionales hongroises chargées de la protection de l’environnement. En défaut de paiement, la société a été nationalisée. Malgré les sommes importantes investies dans la dépollution, des centaines d’hectares restent interdits à la culture. La majorité des habitants ont été relogés à quelques kilomètres des villages sinistrés. D’autres ont refusé de revenir vivre dans la région.

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Martine Porez – Journaliste

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