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Le risque inondation par ruissellement
La prise en compte du risque inondation par ruissellement dans les plans de continuité des entreprises évolue : le climat change, les outils de diagnostic aussi.
Les inondations font naturellement partie des risques majeurs identifiés dans les plans de continuité d’activité et d’urgence des entreprises. Près de 10 millions d’emplois en France sont localisés dans des zones à risque, soit environ un tiers des emplois.
Trois types d’inondations
Les inondations sont souvent divisées en trois grandes catégories : fluviales, côtières et pluviales.
Les inondations fluviales se produisent lorsque le niveau d’une rivière, d’un ruisseau ou d’un cours d’eau monte, permettant à l’eau de s’écouler sur les zones environnantes. Elles peuvent être qualifiées de « défendues » lorsqu’on mobilise des moyens naturels ou humains tels que des digues, barrages ou canaux, pour préserver les grandes villes, ou « non-défendues », quand ces moyens sont inopérants ou déjà saturés.
Les inondations côtières interviennent quand les terres sont inondées par l’eau de mer, en cas notamment de crues pénétrantes en vagues de submersion qui peuvent être accentuées en cas de conjonction de dépressions et de coefficients de marée élevés.
Enfin, les inondations pluviales ou par ruissellement, se produisent lorsque les eaux de pluie sont accélérées par des pentes, et ne peuvent pas ou plus s’infiltrer, lors d’un phénomène pluvieux de haute intensité sur une courte période ou sur plusieurs jours d’affilée.
Le phénomène de ruissellement
En milieu urbain, lors de pluies intenses, les débits peuvent être très importants et saturer les réseaux d’évacuation des eaux pluviales et les ouvrages hydrauliques. Les débordements occasionnés s’effectuent alors en empruntant généralement les rues, avec des vitesses importantes combinées à des hauteurs d’eau variables. Ils peuvent ainsi occasionner des dégâts humains et matériels conséquents. En milieu rural, l’eau rencontre des sols sans couverture végétale ou cultivés dans le sens de la pente, ruisselle et inonde les zones situées en bas des champs.
En milieu rural, l’eau rencontre des sols sans couverture végétale ou cultivés dans le sens de la pente, ruisselle et inonde les zones situées en bas des champs.
Savoir si un bien est en zone inondable ne suffit plus
Des outils et sources d’informations variées existent pour identifier une exposition aux risques d’inondation fluviale, comme les diagnostics de Géorisques, de R4RE, de Climadiag ou des outils en ligne mis à disposition par quelques assureurs. La granularité n’est pas toujours assez fine pour être utile et les données ne sont pas nécessairement mises à jour. Néanmoins, ces diagnostics permettent de vérifier si un bâtiment est en zone inondable, s’il est à proximité de fleuves, de lacs, de rivières, s’il fait l’objet d’un plan de prévention des risques d’inondation (PPRI) ou encore s’il y a eu des arrêtés de catastrophe naturelle (CatNat) sur la commune.
Mais les inondations ne se limitent pas aux zones inondables ou aux communes ayant déjà été touchées. En Île-de-France, 92 % des communes ont fait l’objet d’au moins un arrêté CatNat pour des phénomènes d’inondation entre 1982 et 2021, dont 88 % étaient dus à des phénomènes de ruissellement. Dans de nombreux cas, ces inondations ne se sont pas produites dans une zone inondable.
Changement climatique et régime de précipitations
Avec le changement climatique, le régime de précipitations se modifie. Les précipitations sont concentrées sur moins de mois en hiver et moins de jours dans l’année. Autrement dit, le nombre de jours avec précipitations intenses augmente, et les risques d’inondations par ruissellement aussi. L’essor de phénomènes météorologiques courts, mais extrêmes doit amener à repenser la manière d’anticiper les risques inondation. Cela constitue à la fois un enjeu de durabilité et de continuité d’activité important avec la nécessité de repenser la dotation en sites de repli et la gestion de l’urgence.
Les situations de crise causées par des inondations soudaines consécutives à des pluies violentes se multiplient. L’exemple de Swiss Life Luxembourg en 2021 est éloquent. Dans la nuit du 14 au 15 juillet, à la suite d’une inondation majeure par ruissellement dans une zone non située en zone inondable, « il y avait un mètre d’eau dans le parking, et le transformateur électrique était complètement inondé », résume Mike Winants, Office & Facility
Manager chez Swiss Life. Cette situation a amené au déclenchement du plan d’urgence et de continuité d’activité de l’entreprise, notamment au regard de la nécessité d’assurer certaines activités sur site et de l’indisponibilité de l’accès à une partie du site, de l’interruption des flux électriques et de l’inondation des accès parkings.
Une nouvelle approche du diagnostic au service des gestionnaires de risque
Le climat change, la manière de mesurer les risques inondation et de les anticiper aussi. Un diagnostic statique qui ne scénarise pas et ne projette pas les connaissances climatiques est devenu caduc et conduit à ne pas prendre les actions d’adaptation ou de prévention qui auraient dû être prises, ou à des décisions inadaptées.
En s’appuyant sur la science et la technologie, Tardigrade AI a développé un diagnostic de performance climatique (DPC) complet répondant aux besoins des réglementations comptables (IFRS) et de développement durable (CSRD). Coconstruit avec des gestionnaires de risque, des responsables de chaînes d’approvisionnement, de plan de continuité d’activité et de ressources humaines, le DPC évalue la vulnérabilité actuelle et à venir d’une entreprise au changement climatique, et permet de sélectionner et dimensionner les actions d’adaptation pour renforcer sa résilience. Il propose, pour chaque péril climatique, des indicateurs de risque actionnables, c’est-à-dire des indicateurs qui permettent de sélectionner et de dimensionner aisément des actions d’adaptation.
La hauteur d’eau modélisée et géolocalisée
Pour le péril inondation, la métrique est éminemment actionnable puisqu’il s’agit de la hauteur d’eau géolocalisée par catégorie d’inondation, pour un ensemble de périodes de retour. Le terrain est reproduit numériquement à partir de la cartographie globale Fabdem (Forest and Buildings Disabled Copernicus DEM) et du modèle numérique d’élévation de Copernicus GLO-30. Fabdem est complété par des ensembles modèles numériques de terrain de haute résolution (tels que LiDAR, Copernicus, GLC, ETH GCH, WSF3D), permettant une prise en compte fine de la nature des sols, des hauteurs d’immeubles, du couvert forestier, de la pente et de l’urbanisation. La résolution est d’une seconde d’arc, soit environ 20 m en France. Les projections de précipitations et autres informations hydrologiques sont appliquées à ce jumeau numérique de terrain, pour estimer les hauteurs d’eau en tout point en cas d’inondation fluviale, pluviale ou côtière.
Le radar de risque inondation pour une meilleure résilience
Le DPC de Tardigrade AI fournit les hauteurs d’eau moyennes dans et à proximité immédiate d’un bâtiment pour les périodes de retour de 10, 20, 50, 100 et 1 000 ans. La distance autour du bâtiment est variable selon les besoins. Les radars permettent d’évaluer la situation des voies d’accès et d’évacuation possibles dans le cadre d’un plan de continuité d’activité, et aide à la conception des actions d’adaptation.
L’exemple de Beauvoir-sur-Mer
L’actualité récente en France fournit de multiples exemples pour lesquels cette méthodologie d’analyse de risque s’applique. Le 18 juin 2024 par exemple, à la suite d’un orage, les habitants de Beauvoir-sur-Mer (Vendée) ont été réveillés en pleine nuit avec 80 centimètres d’eau dans la maison. Aux adresses concernées, les diagnostics usuels indiquaient qu’il n’existait pas de risque inondation. En revanche, le DPC montre que la hauteur d’eau potentielle associée à un risque de ruissellement est de 81 cm avec une probabilité de se produire de 2 % dans l’année en cours, de 18,1 % dans les 10 ans et de 33 % dans les 20 ans (voir schéma ci-dessous). La connaissance de ces informations aurait permis aux victimes d’anticiper, de protéger leurs biens, limitant ainsi le montant des dégâts et le traumatisme.
Article extrait du n° 603 de Face au Risque : « Le risque inondation » (septembre-octobre 2024).
Jean-Louis Bertrand
Professeur à l’Essca Management School et CEO de Tardigrade AI
Miia Chabot
Professeure à l’Essca Management School
Nicolas Dufour
Docteur en sciences de gestion, professeur des universités associé au CNAM et Risk Manager dans le secteur de l’assurance
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