La logistique des matières dangereuses à l’heure de la réglementation post-Lubrizol

3 septembre 20246 min

Quels sont les enseignements de la réglementation post-Lubrizol sur la logistique des matières dangereuses ? Tour d’horizon des principales évolutions depuis son entrée en vigueur.

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Cinq ans après la catastrophe de Lubrizol, de nombreux enseignements ont été tirés, pour prévenir et lutter de la manière la plus efficace possible contre les incendies de produits inflammables. Cela s’est traduit par un renforcement de la réglementation ICPE des entrepôts Seveso seuils haut et bas.

Outre l’exigence d’une connaissance «sans faille» de l’état et de la quantité des matières dangereuses stockées, une des carences révélées par l’accident de Lubrizol, la réglementation impose aujourd’hui aux entrepôts classés ICPE de mettre en œuvre tous les moyens nécessaires pour prévenir et lutter contre l’incendie sous toutes ses facettes, d’un système automatique de détection aux débits en eau nécessaires en passant par une cartographie des flux thermiques et toxiques.

Au-delà de prévenir le risque, la nouvelle réglementation nécessite de mettre en place une stratégie exhaustive de lutte contre les incendies en vue de les prévenir et maîtriser, en prenant en compte toutes les spécificités des catégories de matières dangereuses stockées et tous les scénarios possibles des effets des produits de décomposition – gêne olfactive, pollution, toxicité.

Focus sur les principales évolutions en termes de défense et de maîtrise de l’incendie, à l’heure de la réglementation post-Lubrizol.

La réglementation post-Lubrizol amplifie la défense incendie

Une des évolutions majeures de la réglementation post-Lubrizol concerne le calcul du besoin et du volume d’eau nécessaire aux pompiers lors d’un incendie. Il n’est plus sur 2 heures mais de 3 à 4 heures. À ce titre, les entrepôts ICPE doivent doubler leurs capacités pour assurer la continuité de l’eau sur 3 à 4 heures, via des solutions internes ou externes.

Si certains ont fait le choix de signer des conventions d’échanges d’eau avec des entreprises voisines, nous pensons qu’il est essentiel de privilégier l’autonomie dans la création de réserve en eau, en augmentant les capacités d’eau des cuves de sprinklers et en multipliant les bassins extérieurs pour toujours plus de sécurité.

Il en va de même pour le système de détection automatique de l’incendie, désormais obligatoire, qui doit être uniformisé et centralisé, quelle que soit l’étendue du site concerné. Nous avons fait le choix de relier notre système de détection automatique d’incendie de nos différents entrepôts, qui s’appuie sur un double système de transmission IP et GSM, à un superviseur qui alerte immédiatement le poste de garde, le poste central et la direction logistique afin de gagner en réactivité en cas de sinistre.

Les premières minutes sont capitales pour limiter le préjudice d’un incendie.

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Notre grand dossier “Le plan d’actions post-Lubrizol“.

Les autres évolutions de la réglementation post-Lubrizol

Autres évolutions de la réglementation post-Lubrizol et non des moindres, la défense incendie des liquides inflammables a été considérablement renforcée selon trois volets :

  • le dimensionnement du système de drainage ;
  • les équipements nécessaires à l’autonomie ;
  • et le bassin de rétention.

Afin d’éviter un feu de nappe qui couvre une large superficie, nous nous sommes équipés d’un système de drainage tous les 500m2, qui peut évacuer jusqu’à 1000m3 par heure, dans un bassin de rétention. Pour gagner en autonomie dans la défense incendie, nous prévoyons de nous équiper d’un canon à mousse, qui complétera notre système de sécurité par sprinkleurs, sur notre site de Chalon-sur-Saône, pour éviter la ré-inflammation des liquides dans le bassin de rétention.

Et ce n’est qu’un début, la réglementation va s’intensifier dans les prochaines années. En 2026, le stockage de «contenant fusible» sera interdit, au-delà d’une certaine capacité et dangerosité des matières. Il sera donc nécessaire pour les industriels de revoir le conditionnement des produits inflammables, et les logisticiens d’y veiller.

Une maîtrise réhaussée pour les effets inhérents à un incendie

Lors d’un incendie, les matières dangereuses dégagent des produits de décomposition qui peuvent générer des flux thermiques ou toxiques plus ou moins importants.

Aujourd’hui, les entrepôts ICPE doivent effectuer une étude de danger sur un périmètre beaucoup plus large afin de mieux appréhender et contenir les effets d’un ou plusieurs scénarios d’accidents – incendie, dispersion de produits, simulation des rayons toxiques. L’étude de danger, qui combine de multiples scénarios, doit garantir au logisticien de connaître les principaux de produits de décomposition ou altération liés aux matières dangereuses stockées auxquels il sera confronté lors d’un incendie ou accident.

À cela s’ajoute que le logisticien doit pouvoir, en quelques heures, réaliser des prélèvements et confier les échantillons pour les faire analyser par un laboratoire accrédité. Il doit également fournir un état précis du stockage des grandes familles de produits dangereux à «l’instant T». En effet, un des autres enseignements de l’accident de Lubrizol, c’est la nécessité pour le logisticien d’instaurer une communication plus accessible et transparente à destination des acteurs publics et des citoyens.

Ce qu’il faut retenir de la réglementation post-Lubrizol

En conclusion, la réglementation post-Lubrizol a considérablement renforcé les prescriptions pour prévenir les incendies et réagir de manière pertinente en cas d’incident dans les entrepôts ICPE.

Nous avons déjà fait le choix d’innover dans la prévention et la protection incendie, en nous appuyant sur notre expérience «terrain» et ses nombreux partenaires. Et demain, nous pensons que l’intelligence artificielle (IA) nous permettra de modéliser, de manière toujours plus fine, les flux thermiques et toxiques en vue d’identifier de nouveaux effets sur des zones de plus en plus élargies.

Entre innovation et défis réglementaires, le prestataire logistique de matières dangereuses que nous sommes se doit d’insuffler une nouvelle culture du risque incendie dans notre secteur, des équipements aux meilleures pratiques.

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Alban Boidron, directeur messagerie et responsable sécurité Groupe Blondel Sobotram

Alban Boidron

Directeur messagerie et responsable sécurité Groupe Blondel Sobotram

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