L’exposition des sapeurs-pompiers aux cancers professionnels
De nombreuses études démontrent que les sapeurs-pompiers sont exposés aux cancers professionnels. Pour autant, la liste des cancers reconnus comme maladies professionnelles chez les sapeurs-pompiers peine à être élargie.
Des preuves de cancérogénicité suffisantes
Le sujet n’est pas nouveau. Déjà, en 2007, le Centre international de recherche sur le cancer (Circ) avait classé la lutte contre l’incendie comme cancer probable pour l’homme. Ce même organisme, qui dépend de l’OMS (Organisation mondiale de la santé), avait réuni, en juin 2022 dans ses locaux de Lyon, 25 chercheurs de 8 pays différents « pour finaliser leur évaluation de la cancérogénicité de l’exposition professionnelle en tant que pompier ».
Ce groupe de chercheurs avait conclu que les preuves étaient « suffisantes » pour classer l’exposition professionnelle des pompiers comme cancérogène concernant le mésothéliome et le cancer de la vessie.
En revanche, les preuves étaient « limitées » pour les cancers du côlon, de la prostate et du testicule, le mélanome et le lymphome non hodgkinien.
L’Anses pointe les risques chimiques liés aux fumées
De son côté, l’Anses avait publié en août 2019 un rapport sur les risques sanitaires liés aux expositions professionnelles des sapeurs-pompiers. L’agence y établissait des recommandations en particulier pour se protéger des risques chimiques liés aux fumées et suies d’incendies. Elle préconisait également un « suivi médical des sapeurs-pompiers (…) intégré dans un dossier unique suivant le sapeur-pompier pendant toute sa carrière ».
La mission du Sénat sur les cancers professionnels des sapeurs-pompiers
S’appuyant sur l’étude du Circ évoquée supra, la sénatrice Émilienne Poumirol avait alerté, le 7 décembre 2023, le ministre de l’Intérieur sur un possible élargissement de la liste des cancers reconnus comme maladies professionnelles chez les soldats du feu. Elle expliquait notamment que « tous les pompiers français [étaient] exposés aux retardateurs de flammes – substances reprotoxiques et cancérigènes reconnues ». Et notait qu’environ 4 % des sapeurs-pompiers seraient victimes de cancers liés à ce type de polluants.
La sénatrice poursuivait en avançant qu’un seul type de cancer (le carcinome du nasopharynx, un cancer qui se développe dans le pharynx), était reconnu comme étant en lien avec l’exposition des pompiers à la fumée des incendies. Ce qui est loin d’être le cas dans d’autres pays :
- Australie : 12 types de cancers reconnus ;
- Canada : 19 ;
- États-Unis : 30.
Émilienne Poumirol questionnait également le ministre de l’Intérieur sur la possibilité d’instaurer « un véritable suivi médical des sapeurs-pompiers ».
La commission des affaires sociales du Sénat a lancé, le 9 février 2024, une mission d’information sur les cancers professionnels des sapeurs-pompiers afin d’évaluer l’action des pouvoirs publics en matière de prévention des risques. Menée par les rapporteures, Émilienne Poumirol et Anne-Marie Nédélec, cette mission devra fournir des propositions concrètes pour limiter l’exposition des sapeurs‑pompiers aux substances nocives et leur « assurer la reconnaissance des conséquences de leur service sur leur santé ».
Dans le cadre de cette mission, les organisations syndicales des sapeurs-pompiers ont été auditionnées début mars. Selon le Groupement syndical national des sapeurs-pompiers volontaires (GSNSPV), les principaux sujets abordés ont été :
- la reconnaissance de plusieurs types de cancer ;
- la mise en place d’une médecine préventive ;
- la mise en place d’outils pour améliorer la protection (EPI, marche en avant, décontamination sur les lieux des sinistres, etc.).
La mission sénatoriale devrait rendre ses conclusions au printemps 2024.
Martine Porez – Journaliste
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