Fouille des véhicules extérieurs à l’entreprise
Nombreux sont les industriels qui obligent leurs clients/prestataires à ouvrir leurs coffres de voiture avant de pénétrer sur leurs sites. Le caractère courant de la fouille des véhicules – réalisée le plus souvent par des agents de sécurité privée – ne signifie pas que celle-ci soit légale.
En toute hypothèse, une mesure de sûreté ne peut être mise en œuvre qu’en accord avec le principe de proportionnalité édicté à l’article L.1121-1 du code du travail. En application de celui-ci, l’inspection visuelle et la fouille de véhicules ne peuvent être réalisées que pour concourir à l’atteinte d’objectifs qui se trouvent être, le plus souvent, celui de la sécurité du site et celui de la lutte contre le vol de matériaux en son sein.
Dans le cadre de cet article, nous nous intéressons à la marge de manœuvre dont disposent les agents de sécurité pour effectuer des contrôles visuels/fouilles de véhicules extérieurs à l’entreprise. Nous n’aborderons pas les cas dans lesquels l’employeur peut procéder à la fouille des salariés ou de leurs biens (dans le cadre de la recherche d’objets volés par exemple).
Attributions des agents de sécurité fixées par le CSI
Le CSI (code de la sécurité intérieure) encadre la possibilité pour les agents de sécurité de procéder à la fouille des bagages. En effet, l’article L.613-2 permet aux agents exerçant une activité de surveillance humaine ou de gardiennage (de biens meubles ou immeubles) de « procéder à l’inspection visuelle des bagages et, avec le consentement de leur propriétaire, à leur fouille ».
Ces agents peuvent également procéder à ces actes pour permettre à des personnes d’accéder aux enceintes dans lesquelles est organisée une manifestation sportive, récréative ou culturelle rassemblant plus de 300 spectateurs (L.613-3). Ainsi, des agents de sécurité peuvent inspecter/fouiller des véhicules dans des lieux privés si leur statut le leur permet (sont visés les agents exerçant une activité de surveillance ou de gardiennage visée au 1e de l’article L.611-1 du CSI).
À la lecture de ces dispositions, il apparaît que l’accord du propriétaire des éléments à contrôler est requis. De fait, ces contrôles vont très rapidement se heurter aux droits fondamentaux dont bénéficie chaque citoyen.
Visite des véhicules sur le domaine public
Le code de procédure pénale (CPP) habilite uniquement les officiers de police judiciaire (OPJ), assistés le cas échéant des agents de police judiciaire (APJ) et des APJ adjoints, pour visiter « les véhicules circulant, arrêtés ou stationnant sur la voie publique ou dans des lieux accessibles au public ».
Ces contrôles peuvent être réalisés :
- sur réquisitions écrites du procureur de la République (78-2-2 du CPP) ;
- lorsqu’il existe à l’égard du conducteur ou d’un passager des raisons de croire qu’il a commis un crime ou un délit flagrant (78-2-3) ;
- pour prévenir une atteinte grave à la sécurité des personnes et des biens (78-2-4) ;
- lorsqu’une personne est soupçonnée de participer à une manifestation/réunion publique en portant une arme (78-2-5).
Par ailleurs, dans le cadre de recherche de fraude douanière, le code des douanes permet à ses agents de fouiller les moyens de transport (article 60).
Des exceptions
Il existe des exceptions au principe de compétence exclusive des OPJ et des agents des douanes en matière de fouilles de véhicules.
Conformément au code des transports, les agents chargés des visites de sûreté portuaire et aéroportuaire peuvent, sous la supervision des OPJ ou des agents des douanes :
- procéder à la fouille et à la visite des véhicules pénétrant ou se trouvant dans la zone côté piste des aérodromes (L.6342-4) ;
- mettre en œuvre des contrôles sur les « véhicules, unités de transport intermodal, marchandises, bagages, colis et autres biens pénétrant ou se trouvant dans les limites portuaires de sûreté » (L.5332-15).
« Dans un cadre privé, un agent titulaire de la qualification professionnelle Agent de prévention et de sécurité (CQP APS) peut demander au conducteur d’ouvrir son coffre pour procéder à une vérification visuelle de celui-ci. »
Inspection visuelle des véhicules de livraisons
Il résulte de ce qui précède qu’un agent de sécurité ne peut pas, de sa propre initiative, ouvrir ou fouiller le coffre d’un véhicule présent sur un lieu, qu’il soit public ou privé.
Cependant, dans un cadre privé, un agent titulaire de la qualification professionnelle Agent de prévention et de sécurité (CQP APS) peut demander au conducteur d’ouvrir son coffre pour procéder à une vérification visuelle de celui-ci (sans pour autant toucher aux effets personnels présents dans le véhicule).
En la matière, une note de la directrice des libertés publiques et des affaires juridiques en date du 11 septembre 2023 a clarifié « l’encadrement de la mission d’inspection visuelle des coffres de voitures pour l’accès aux enceintes privées ». Elle autorise, sous conditions, l’inspection visuelle des véhicules de livraisons de biens et de marchandises par les agents privés de sécurité.
Il convient également de prendre en considération les points suivants :
- le règlement intérieur de l’établissement, qui s’applique également aux intervenants d’entreprises extérieures pour les mesures de sécurité et la discipline générale, doit imposer un contrôle visuel des coffres des véhicules souhaitant pénétrer sur le site. Dès lors que les modalités des fouilles sont précisées dans le règlement intérieur, l’employeur doit les respecter afin que celles-ci soient régulières ;
- la fouille/l’inspection visuelle doit être réalisée en présence du conducteur ;
- la société de sécurité doit définir une consigne détaillant la ligne de conduite que les agents de sécurité doivent suivre (conformément au règlement intérieur, à la législation en vigueur et à la jurisprudence) ;
- les agents de sécurité doivent respecter cette procédure à chaque contrôle ;
- en cas de vols sur le site, l’employeur doit déposer plainte et être en capacité de les prouver à long terme (suivi des pertes et vols).
Article extrait du n° 599 de Face au Risque : « Gérer les risques émergents » (janvier-février 2024).
Manon Janvier
Consultante au service Assistance réglementaire de CNPP Conseil & Formation
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