La Cnil inflige une amende de 32M€ à Amazon France Logistique
Amazon France Logistique a été condamnée le 27 décembre par la Cnil pour avoir mis en place un système de surveillance excessivement intrusif de l’activité et des performances des salariés. Les scanners utilisés par les employés pour traiter les colis sont notamment pointés du doigt.
La formation restreinte de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) a condamné Amazon France Logistique à une amende de 32 millions d’euros pour surveillance excessive de ses salariés et plusieurs manquements au RGPD, le règlement européen sur la protection des données, apprend-on dans un communiqué publié le 23 janvier 2024. La délibération a été publiée au Journal officiel le 27 décembre 2023.
L’amende équivaut à environ 3 % du chiffre d’affaires de l’entreprise française. “Une sanction quasiment sans précédent, a indiqué la Cnil à l’AFP, le maximum encouru étant une amende à hauteur de 4 % du chiffre d’affaires.”
Les scanners en cause
Amazon France Logistique gère les entrepôts de grande taille du site de commerce en ligne, dans lesquels les salariés reçoivent et stockent les articles commandés puis préparent les colis à livrer aux clients.
Chaque salarié des entrepôts est muni d’un scanner au moyen duquel il documente en temps réel l’exécution de certaines tâches (stockage ou prélèvement d’un article dans les rayonnages, rangement ou emballage…). “Chaque scan effectué par les salariés donne lieu à l’enregistrement de données, qui sont conservées et qui permettent de calculer des séries d’indicateurs renseignant sur la qualité, la productivité et les périodes d’inactivité de chaque salarié, individuellement”, explique la Cnil dans son communiqué.
C’est la conservation de toutes ces données et les indicateurs en résultant qui ont été jugés disproportionnés par la Cnil qui, à la suite d’articles de presse dénonçant certaines pratiques mises en œuvre par Amazon France Logistique dans ses entrepôts et après avoir reçu plusieurs plaintes de salariés, a lancé en 2019 une procédure de contrôles.
Des indicateurs intrusifs
La formation restreinte de la Cnil a considéré que trois indicateurs traités par la société étaient illégaux :
- l’indicateur « stow Machine Gun » qui suit de manière constante tout rangement effectué par un salarié à la seconde près et y associe une erreur en cas de rangement trop rapide (en moins de 1,25 seconde après avoir scanné un précédent article) ;
- l’indicateur « idle time » (temps d’inactivité), qui signale des périodes d’interruption d’un scanner de dix minutes et plus ;
- l’indicateur « temps de latence inférieurs à dix minutes », qui signale des périodes d’interruption d’un scanner entre une à dix minutes.
Une pression continue pour les salariés
“De tels systèmes maintenaient les salariés sous une surveillance étroite pour toutes les tâches effectuées avec des scanners et faisaient ainsi peser sur eux une pression continue », dénonce la Cnil. Elle a également pris en compte le nombre important de personnes concernées (plusieurs milliers) et a considéré que les contraintes imposées aux salariés via ce suivi participait directement aux gains économiques de la société.
Des manquements liés à la vidéosurveillance
La Cnil a également relevé que les salariés et les visiteurs extérieurs n’étaient pas correctement informés des systèmes de vidéosurveillance et que l’accès au logiciel de vidéosurveillance n’était pas suffisamment sécurisé.
La réponse d’Amazon
“Nous sommes en profond désaccord avec les conclusions de la Cnil qui sont factuellement incorrectes et nous nous réservons le droit de faire appel. L’utilisation de systèmes de gestion d’entrepôt est une pratique courante du secteur : ils sont nécessaires pour garantir la sécurité, la qualité et l’efficacité des opérations et pour assurer le suivi des stocks et le traitement des colis dans les délais et conformément aux attentes des clients”, a réagi Amazon dans un communiqué.
Le groupe y annonce par ailleurs, suite à la délibération de la Cnil, la désactivation de l’indicateur “stow machine gun” et le passage du seuil de déclenchement de l’indicateur “idle time” de 10 à 30 minutes.
Le groupe dispose d’un délai de deux mois pour faire appel.
Gaëlle Carcaly – Journaliste
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