Qualité de l’air intérieur : du nouveau dans la surveillance de certains ERP
Ce dispositif réglementaire, en vigueur depuis 2018 dans les ERP publics ou privés accueillant des populations sensibles, a connu une réforme d’envergure au 1er janvier 2023.
Historique du dispositif et contexte de la réforme
Les enfants représentent la population la plus sensible à la qualité de l’air intérieur. Ils peuvent en outre être exposés dans les écoles et les lieux d’accueil, de manière significative, à plusieurs polluants émis notamment par le mobilier, les produits d’entretien ou les fournitures scolaires.
Afin de diminuer leur exposition, la loi Grenelle II a rendu obligatoire la surveillance de la qualité de l’air intérieur (QAI) dans certains établissements accueillant ce public sensible. Instauré de manière progressive, le dispositif concernait les crèches et les écoles depuis 2018, les collèges, lycées et accueils de loisirs à compter de 2020, et devait être étendu au 1er janvier 2023 à une dernière série d’établissements (structures sociales et médico-sociales, établissements pénitentiaires pour mineurs, piscines). Cette surveillance, renouvelée selon une périodicité fixe de sept ans, visait à évaluer l’état des moyens d’aération et à identifier la présence de polluants dans l’air, via des mesures de polluants réalisées par un organisme accrédité ou un autodiagnostic aboutissant à un plan d’actions.
Un retour d’expérience à cinq ans sur la mise en œuvre de ce dispositif a mis en lumière plusieurs problématiques, avec au premier plan le caractère inadapté de la périodicité des mesures de polluants. En effet, la période de sept ans a été considérée comme trop longue et ne tenant pas compte des étapes clé de la vie du bâtiment (construction, aménagements, rénovations) pouvant impacter la QAI. De plus, les campagnes de mesures réglementaires ont été boudées par les établissements puisque, selon les statistiques, seuls 8 % en ont fait réaliser.
À l’inverse, un consensus s’est dégagé sur le fort intérêt des autodiagnostics, qui permettent aux établissements et aux collectivités de devenir acteurs de la QAI.
Dans le cadre du quatrième plan national santé environnement (PNSE) « Un environnement, une santé » (2021- 2025), publié le 7 mai 2021 par les ministères en charge de la santé et de l’écologie, il a donc été décidé de faire évoluer cette surveillance pour faciliter son appropriation par les acteurs concernés et permettre une amélioration continue de la QAI (cf. action n° 14 – 4e partie).
Sont présentées ci-après les nouveautés de ce dispositif.
Évolution du dispositif
La surveillance de la QAI doit désormais être mise en place en suivant 4 étapes obligatoires :
- étape A : une évaluation annuelle des moyens d’aération des bâtiments incluant la mesure du dioxyde de carbone (CO2) comme traceur du renouvellement de l’air intérieur ;
- étape B : un autodiagnostic de la QAI, réalisé au moins tous les quatre ans ;
- étape C : une campagne de mesures des polluants réglementaires (formaldéhyde, benzène, CO2) réalisée à chaque étape clé de la vie du bâtiment pouvant impacter la QAI ;
- étape D : un plan d’actions prenant en compte les 3 étapes précédentes, visant à améliorer la QAI et régulièrement actualisé pour proposer des actions correctives.
ÉTAPE A
Évaluation annuelle des moyens d’aération
- Quand ? Tous les ans
- Par qui ? Avec le concours du personnel occupant les bâtiments, l’évaluation peut être réalisée par :
- toute personne compétente en interne ;
- un contrôleur technique ;
- un bureau d’études ou un ingénieur- conseil intervenant dans le domaine du bâtiment ;
- un organisme effectuant les campagnes de mesures de polluants.
- Comment ? L’évaluation des moyens d’aération comporte, pour chaque pièce examinée :
- une vérification des ouvrants donnant sur l’extérieur (accessibilité et manœuvrabilité) ;
- un examen visuel des dispositifs de ventilation et un constat de leur fonctionnement ainsi que de la circulation adéquate de l’air ;
- une mesure à lecture directe de la concentration de CO2 dans l’air intérieur[1], permettant la vérification en temps réel des conditions de renouvellement de l’air.
Pièces concernées | Espaces et pièces non concernés |
---|---|
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|
Le rapport d’évaluation contient la description synthétique de l’établissement dont les pièces examinées, les modes d’aération ou de ventilation principaux, les résultats et les conclusions de l’évaluation des moyens d’aération, incluant le descriptif des actions correctives.
[1] Cette mesure fait suite à l’avis du HCSP du 21 janvier 2022 qui met en évidence le lien entre l’élévation des concentrations de CO2 au sein d’un établissement d’une part, et une diminution des performances cognitives associée à l’augmentation de la concentration d’agents infectieux aéroportés d’autre part (retour d’expérience Covid).
ÉTAPE B
Autodiagnostic
- Quand ? Tous les 4 ans
- Par qui ? L’autodiagnostic de la QAI est réalisé avec les catégories suivantes d’intervenants dans l’établissement :
- l’équipe de gestion ;
- les services techniques chargés de la maintenance ;
- les responsables des activités des pièces considérées ;
- le personnel d’entretien.
- Comment ? L’autodiagnostic porte notamment sur :
- l’identification et la réduction des sources d’émission de substances polluantes au regard notamment des matériaux, de l’équipement et des activités ;
- l’entretien des systèmes de ventilation et des moyens d’aération ;
- la diminution de l’exposition des occupants aux polluants résultant, en particulier, des travaux et des activités de nettoyage.
Des grilles indicatives d’autodiagnostic pour chaque catégorie d’intervenants figurent dans le guide visant à accompagner la mise en œuvre de la surveillance réglementaire de la QAI, publié sur le site du ministère chargé de l’environnement.
ÉTAPE C
Campagnes de mesures aux étapes clés de la vie du bâtiment
- Quand ? Initiées dans le mois suivant la fin de la réalisation d’une étape clé pouvant impacter la QAI (date de réception du bâtiment ou des travaux ou date de changement de l’utilisation des pièces)
- Par qui ? Organismes accrédités
- Comment ? La campagne complète de mesures des polluants est constituée :
- de deux séries de prélèvements pour le formaldéhyde et le benzène, effectuées au cours de deux périodes espacées de quatre à sept mois, dont l’une se déroule pendant la période de chauffage de l’établissement si elle existe ;
- d’une mesure en continu du CO2 effectuée sur une seule période, pendant la période de chauffage de l’établissement, si elle existe.
Certaines étapes clés ne requièrent pas de campagne complète et peuvent faire l’objet d’une campagne partielle qui cible uniquement certains polluants.
Le calcul du seuil de déclenchement des campagnes de mesures s’opère en rapportant la surface du plancher des pièces concernées par les travaux présentés dans le tableau à la surface du plancher des pièces du bâtiment ou de l’établissement concerné.
La surface concernée par les petits et moyens travaux du bâtiment appartenant à un ERP est calculée sur une période de 6 mois glissants, à partir de la date du début des premiers travaux.
Les mesures aux étapes clés de la vie du bâtiment
ÉTAPE D
Plan d’actions
- Quand ? Établi à l’issue des étapes A, B et C et mis à jour a minima tous les 4 ans
- Par qui ? Le propriétaire ou, le cas échéant, l’exploitant
- Comment ? Le plan d’actions définit, à partir des résultats de l’évaluation annuelle des moyens d’aération, de l’autodiagnostic et de la campagne de mesures, des actions visant à améliorer la QAI. Chaque action identifiée doit comprendre les éléments suivants :
- titre de l’action ;
- description de l’action ;
- responsable de l’action et personnes associées ;
- calendrier de réalisation envisagé.
Après la mise en place du plan d’actions, le propriétaire, ou le cas échéant, l’exploitant de l’établissement, doit informer le public par voie d’affichage sur les résultats de l’évaluation des moyens d’aération et sur la mise en place du plan d’actions.
Calendrier d’application
Évolution des établissements visés et du calendrier d’application
La liste des ERP soumis à l’obligation de surveillance de la QAI a été mise à jour dans le cadre de la réforme (voir le calendrier d’application ci-dessus). Sont concernés :
- À compter du 1er janvier 2023 :
- les établissements d’accueil collectif d’enfants de moins de 6 ans ;
- les accueils de loisirs pour mineurs ;
- les établissements d’enseignement ou de formation professionnelle des 1er et 2nd degrés.
- À compter du 1er janvier 2025 :
- les structures sociales et médicosociales rattachées aux établissements de santé mentionnés à l’article L.6111-1 du code de la santé publique ainsi que les structures de soins de longue durée de ces établissements ;
- les établissements mentionnés aux 1°, 2°, 4°, 6°, 7° et 12° du I de l’article L.312-1 du code de l’action sociale et des familles ;
- les établissements pénitentiaires pour mineurs.
- Sortent expressément du dispositif :
- les établissements d’activités physiques et sportives couverts dans lesquels sont pratiquées des activités aquatiques, de baignade ou de natation ;
- les locaux à pollution spécifique mentionnés à l’article R.4222-3 du code du travail (locaux dans lesquels des substances dangereuses ou gênantes sont émises sous forme de gaz, vapeurs, aérosols solides ou liquides autres que celles qui sont liées à la seule présence humaine ainsi que locaux pouvant contenir des sources de micro-organismes potentiellement pathogènes et locaux sanitaires).
La surveillance de la qualité de l’air doit désormais être mise en place en suivant 4 étapes obligatoires : évaluation annuelle des moyens d’aération, autodiagnostic, mesures des polluants réglementaires lors de l’évolution du bâtiment et plan d’actions correctives.
Les outils de la réforme
Article extrait du n° 591 de Face au Risque : « Analyser les risques » (avril 2023).
Morgane Darmon
Consultante experte au service Assistance réglementaire de CNPP Conseil & Formation
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