Sous-traitance et intérim : des accidents de travail plus nombreux ?

21 mars 20234 min

C’est l’objet d’une étude de la Dares portant sur l’exposition aux risques des salariés des entreprises sous-traitantes. Il apparaît que les risques sont de nature différente selon le taux de recours à la sous-traitance et le degré de dépendance entre le preneur d’ordres et le donneur d’ordres. Les salariés permanents des entreprises ayant recours à l’intérim sont eux-aussi sujets à des accidents plus nombreux.

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L’étude de la Dares (Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques du ministère du Travail), publiée le 1er mars 2023, s’intitule « les salariés des entreprises sous-traitantes sont-ils davantage exposés aux accidents du travail ? ».

L’étude s’appuie sur des enquêtes sur les conditions de travail conduites en 2019. Le périmètre défini est constitué des établissements à majorité d’ouvriers et d’employés (les plus exposés aux accidents du travail) du secteur privé non agricole.

Sous-traitance, intérim : des taux d’accidents du travail plus élevés

L’étude rappelle deux constats :

  • le taux d’accident plus élevé chez les salariés employés par des entreprises prestataires, dont l’activité dépend principalement de la sous-traitance d’entreprises donneuses d’ordres ;
  • les donneurs d’ordres peuvent choisir d’externaliser les travaux les plus dangereux ;
  • la pression économique et la dépendance vis-à-vis d’un ou plusieurs donneurs d’ordres peut amener une intensification du travail et des mesures de prévention insuffisantes ;
  • en cas de sous-traitance sur le site de l’entreprise utilisatrice, la coactivité sur le même lieu de travail peut engendrer une désorganisation du travail ;
  • les TPE et PME preneuses d’ordres bénéficient souvent moins de ressources extérieures en termes de sécurité (organismes de prévention, contrôles et conseils de l’Inspection du travail).
  • l’accidentalité plus élevée chez les travailleurs intérimaires, ce personnel d’une entreprise spécialisée en intérim mis temporairement à la disposition d’une entreprise utilisatrice pour une mission bien délimitée. Et cela, même s’il existe un phénomène de sous-déclaration des accidents du travail chez cette population de travailleurs.
  • une moindre formation et une moindre expérience sur les postes de travail ;
  • une exposition à des conditions de travail plus difficiles ;
  • l’insécurité socio-économique qui pousse à moins respecter les consignes de sécurité

Sous-traitance : des risques de nature différente selon le degré de dépendance

L’étude met en évidence que la nature des risques auxquels sont exposés les personnels des entreprises preneuses d’ordres, exerçant sur le site du donneur d’ordres, varie selon la part de sous-traitance dans le chiffre d’affaires (CA) :

entre 10 % et 50 % de sous-traitance dans le CA, les risques sont plus “de nature physique (postures pénibles, agents chimiques dangereux, bruit supérieur à 85 db)” ;

au-delà de 50 % de sous-traitance dans le CA, la nature des risques est plus “de type organisationnel (travail répétitif, travail posté en équipes alternantes)”.

Une observation intéressante est que selon le degré de dépendance de l’entreprise sous-traitante à son donneur d’ordres, le taux d’accident du travail évolue : en effet, au-delà de 50 % du CA consacré aux donneurs d’ordres, le taux d’accident du travail diminue, même s’il reste supérieur à celui des établissements comparables non preneurs d’ordres.

L’explication suggérée est que l’entreprise preneuse d’ordres, étroitement intégrée à son donneur d’ordres, bénéficie en quelque sorte de la meilleure maîtrise des risques de ce dernier, en profitant notamment d’une meilleure prévention des risques physiques mentionnés plus haut.

Intérim : plus de risques également pour les salariés permanents

L’étude signale que les salariés permanents d’un établissement travaillant en situation de coactivité avec du personnel intérimaire sont plus souvent victimes d’accidents du travail.

Là encore, la relation n’est pas linéaire. Elle varie selon le taux de recours à l’intérim de l’établissement considéré :

  • un établissement dont le recours à l’intérim dépasse 4 % de ses effectifs employés en propre voit grimper le taux d’accident du travail de son personnel permanent ;
  • cependant, le taux d’accident diminue à partir du seuil de 10 % d’intérimaires, même s’il reste supérieur à un établissement comparable sans intérimaire.

L’explication avancée est que « l’emploi habituel d’une forte proportion d’intérimaires permet de réduire les incertitudes liées à la coactivité entre salariés de statuts différents », par rapport à une situation où le recours à l’intérim est faible et occasionnel.

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Bernard Jaguenaud, rédacteur en chef

Bernard Jaguenaud – Rédacteur en chef

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