La détection d’intrusion à l’heure du deep learning
Jean-Baptiste Ducatez, PDG de Foxstream, société éditrice de logiciel spécialisé dans l’analyse et le traitement automatique d’images vidéo, fait le point sur les forces et les faiblesses du deep learning utilisé en détection d’intrusion.
Une analyse beaucoup plus fine
Avec le deep learning, la détection d’intrusion est devenue plus précise. On est passé d’une analyse descriptive à une analyse prédictive. En effet, avec l’utilisation de modèles construits par l’apprentissage de plusieurs centaines de millions d’images, les scénarios sont beaucoup plus complexes et la détection beaucoup plus fine.
« Avec le deep learning, on peut détecter un vélo, une voiture, une camionnette, mais aussi faire un suivi d’objet. Et demain, on pourra même différencier le type de voiture et dire s’il s’agit d’une 3008 ou d’une 5008 », explique Jean-Baptiste Ducatez, PDG de Foxstream, société d’édition logicielle spécialisée dans l’analyse et le traitement automatique d’images vidéo.
L’entreprise travaille sur le deep learning depuis 2015 et les solutions construites avec cette évolution de technologie sont à présent complètement intégrées dans son logiciel. L’installation de ce logiciel est simple. Les algorithmes peuvent être, en fonction des situations à surveiller, soit dans un serveur sur site, soit dans un serveur déporté dans le cloud, soit encore en Edge, c’est-à-dire à l’intérieur des caméras. Il s’adapte sur tous les types de caméras : analogiques, IP, thermiques, visibles et ne nécessite pas de les remplacer.
Mais attention, prévient Jean-Baptiste Ducatez, « l’analyse vidéo ne crée pas d’information. Elle ne voit pas autre chose que ce que voient les caméras ». Il faut donc que celles-ci soient bien placées, bien orientées, protégées de la pluie… La phase de pré-étude effectuée avec l’intégrateur permet de vérifier leurs emplacements. D’ailleurs, afin d’être certain que l’installation soit parfaitement conforme, Foxstream a mis au point un outil d’aide à la gestion de projet qu’il donne aux intégrateurs de ses solutions.
« La combinaison d’une analyse traditionnelle et du deep learning est, à mon sens, l’avenir. »
Jean-Baptiste Ducatez, PDG de Foxstream.
Les limites du deep learning
Si le deep learning permet des analyses beaucoup plus précises, il n’est pas encore fiable à 100 % car il ne permet de détecter que ce que la machine a appris.
Par ailleurs, une personne trop éloignée de la caméra, ou qui rampe ou encore qui n’est pas vue en entier car elle passe derrière une voiture par exemple risque de ne pas être détectée.
« Et en détection d’intrusion, vous n’avez pas le droit à l’omission », note Jean-Baptiste Ducatez. En effet, une omission, c’est une intrusion, donc potentiellement un vol, un braquage… « C’est une des limites aujourd’hui du deep learning. C’est pourquoi nous l’utilisons chez Foxstream en combinaison avec les solutions traditionnelles. »
Une autre limite : le deep learning requiert des processeurs (CPU) très puissants pour effectuer des milliards de calculs à la seconde. Les GPU, des processeurs de cartes graphiques, sont donc utilisés pour le deep learning car « ils sont capables de calculer 1 000 opérations pendant qu’un CPU en calcule une, à condition qu’elles soient basiques », précise Jean-Baptiste Ducatez. Il faut savoir cependant que ces processeurs de cartes graphiques sont plus onéreux et, aujourd’hui, ne sont pas disponibles dans la plupart des caméras. « Donc, si la demande nécessite d’avoir beaucoup de CPU, alors le Edge n’est pas possible aujourd’hui. » Par ailleurs, depuis plusieurs mois, les processeurs sont en rupture de stock mondiale à cause de la crise du Covid.
Si la détection d’intrusion demande du temps réel avec une analyse de plusieurs images par seconde, la détection d’une voiture se garant à un endroit interdit peut être analysée avec seulement une image par minute. « Dans ce cas, faisant l’analyse moins souvent, le logiciel consomme moins de ressources. Les besoins en CPU/GPU du deep learning dépendent aussi du cas d’usage », indique le PDG de Foxstream.
Le deep learning offre énormément de promesses en vidéosurveillance, « mais attention, ce n’est pas le graal, prévient Jean-Baptiste Ducatez. Cette technologie demande beaucoup de précautions. Utilisée seule, elle peut être dangereuse, notamment en intrusion. C’est pourquoi la combinaison d’une analyse traditionnelle et du deep learning est, à mon sens, l’avenir. »
Article extrait du n° 572 de Face au Risque : « Vidéosurveillance : les nouveaux usages » (mai 2021).
Martine Porez – Journaliste
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