Mouvements sociaux : risques de coupures d’électricité
Déterminée à montrer son opposition au projet de réforme des retraites, la Fédération des mines et de l’énergie de la CGT (FNME-CGT) envisage des actions fortes. Lors de la journée de mobilisation du 19 janvier, deux coupures d’électricité volontaires ont touché une zone industrielle dans l’Essonne et des bâtiments publics en Haute-Marne.
Alors que la météo électrique affichée par le signal Ecowatt reste au vert en ce début d’hiver, la météo sociale est en train de virer à la tempête. Et ceci peut avoir des conséquences non seulement sur la fourniture ponctuelle d’électricité à court terme, mais également sur la production électrique à plus long terme.
Durant la journée de mobilisation du 19 janvier dernier contre la réforme des retraites, l’expression du mécontentement ne s’est pas cantonnée à la grève et aux manifestations dans la rue. Les syndicalistes de la CGT Mines-Energie ont décidé de prendre la main sur l’outil de production afin de procéder à des coupures d’électricité volontaires, limitées et ciblées.
Des coupures d’électricité limitées et ciblées
Le jeudi 19 janvier 2023, deux communes ont ainsi été la cible de ces coupures d’électricité, Massy dans l’Essonne et Chaumont en Haute-Marne. Selon Le Parisien, ces deux communes ont été ciblées car le syndicat CGT avait prévenu de coupures d’électricité ciblées sur des communes d’élus favorables à la réforme.
À Massy, 1100 clients auraient été concernés entre 6h30 et 7h45 selon Le Figaro, dont ceux d’une zone industrielle, avant que le courant ne soit rétabli. L’action a eu lieu au petit matin, pour ne pas que « cela ait un impact trop fort » sur les entreprises concernées, selon Libération. Enedis a mis en place un gardiennage sur le poste manipulé pour que cela ne se reproduise pas.
À Chaumont, la coupure de courant a touché les bâtiments de la préfecture, du conseil départemental de Haute-Marne, du conseil régional, de la mairie et de l’inspection académique. Les coupures premières se sont échelonnées entre 6h30 et 11h30. Les services se sont retrouvés dans le noir et le personnel a été contraint au télétravail, pour ceux qui le pouvaient.
Dans les deux cas, Enedis a déposé une plainte.
Des coupures similaires en 2019-2020
Le précédent projet de réforme des retraites du Gouvernement, dévoilé par Edouard Philippe le 11 décembre 2019, avait provoqué des actions similaires jusqu’en février 2020. Quelques villes avaient alors été visées par des coupures d’électricité « sauvages » : Paris, Nice, Orléans, Nantes, Bordeaux, Lyon et Poitiers.
Plusieurs milliers de particuliers avaient été impactés à chaque fois. Un site Seveso de Dordogne avait aussi été victime de ces actions ciblées, de même qu’une partie du marché de Rungis.
Le sénateur Alain Cazabone, dans une question d’actualité au gouvernement de décembre 2019, avait évoqué le blocage de « services publics indispensables », tels que des crèches, des hôpitaux et des services administratifs. Dans sa réponse, Emmanuelle Wargon, alors secrétaire d’État auprès du ministre de la Transition écologique, avait aussi mentionné la coupure de « cinq cliniques et d’une caserne de pompiers à Lyon », ainsi que « l’intoxication d’employés liée à la coupure électrique d’un four industriel à Béziers ».
On le voit, non seulement la sécurité des personnes peut être mise en jeu par de telles actions de rupture volontaire de fourniture d’électricité, mais aussi la sécurité des biens ou de l’environnement. Certaines actions “peuvent relever d’un délit (…), tout n’est pas acceptable”, a prévenu le ministre du Travail Olivier Dussopt le lundi 23 janvier.
Vers un durcissement du mouvement ?
À l’heure où nous rédigeons ces lignes, l’agitation médiatique se focalise sur les coupures d’électricité ponctuelles ciblant les permanences ou les communes des élus favorables à la réforme.
Une autre nouvelle est à considérer, la CGT Mines-Energie ayant brandi d’autres menaces : des actions allant de baisses de production à un impact sur le redémarrage des réacteurs nucléaires. Au moment même où le gestionnaire RTE annonçait, considérant les éventuelles opérations de délestages programmées pour cet hiver, que « l’essentiel des risques est derrière nous ».
S’il faut espérer qu’il y ait un long chemin entre les mots et les actes, le durcissement du mouvement social pourrait avoir à terme un impact significatif sur la production d’électricité, et donc sur la sécurité électrique.
À noter que dans notre prochain dossier à paraître, Face au Risque traitera de la préparation des entreprises aux délestages électriques. Nous envisagerons notamment leurs impacts sur le risque industriel et les équipements de sécurité.
Bernard Jaguenaud – Rédacteur en chef
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