FireStat, un projet européen d’harmonisation des statistiques incendie
FireStat est un projet pilote mené à l’échelle européenne afin de recueillir des statistiques fiables et comparables en matière de sécurité incendie dans les bâtiments. Le rapport final de ce projet, assorti de 7 recommandations, vient d’être publié. Un ensemble de 13 variables essentielles, avec des niveaux de priorité, a été proposé. Une vingtaine de pays seraient favorables au projet, ce qui pourrait déboucher à court terme sur une phase expérimentale.
Initié en juillet 2020, le projet européen FiresStat a eu pour mission première d’étudier les systèmes d’élaboration des statistiques d’incendies dans les bâtiments de divers pays représentatifs (internes et externes à l’UE). Le champ des bâtiments retenus étant constitué des « maisons, immeubles d’habitation, immeubles de bureaux, bâtiments commerciaux, hôpitaux, écoles, maisons de retraite, etc. »
Les objectifs poursuivis
L’objectif était d’identifier les points communs et les écarts des systèmes actuellement en vigueur, pour proposer ensuite une méthode fiable et homogène d’établissement des statistiques incendies, avec une double visée :
- améliorer et harmoniser la collecte des données, afin de permettre les comparaisons chiffrées entre les États membres ;
- fournir une base de connaissances pouvant aider à la prise de décision des pouvoirs publics en matière de sécurité incendie dans les bâtiments.
L’utilisation des données sur les incendies peut en effet servir plusieurs causes : aider à réduire les incendies et les pertes associées, orienter efficacement les investissements en sécurité incendie, surveiller les progrès de programme d’action visant à améliorer la sécurité.
Les principales conclusions, assorties de recommandations, ont été synthétisées en juillet 2022 dans un rapport final, rendu public le 21 octobre 2022.
Les acteurs du projet FireStat
A l’origine, le projet FireStat a été commandé par la direction générale du marché intérieur, de l’industrie, de l’entrepreneuriat et des PME (DG Grow) de la Commission européenne. Il a bénéficié d’un financement de la part du Parlement européen.
Le projet a été réalisé par un consortium composé de neuf institutions internationales de sécurité incendie basées dans dix pays, dont le chef de file était l’entreprise Efectis.
L’examen de la terminologie et de la méthode de collecte des données en place dans les systèmes actuels d’élaboration des statistiques d’incendies a été mené dans 27 États membres de l’UE et dans huit autres pays (Australie, Canada, Nouvelle-Zélande, Norvège, Russie, Suisse, Royaume-Uni, États-Unis). Les huit pays non-membres de l’UE ont été choisis « en raison de leurs statistiques réputées structurées et détaillées ».
Un questionnaire a été envoyé aux régulateurs et aux autorités chargées de la lutte contre les incendies dans les États membres, afin de connaître leur position sur les types de données nécessaires pour mener à bien un plan d’action visant améliorer la sécurité incendie.
Premières conclusions et recommandations
Le premier constat est que la plupart des pays utilisent actuellement une approche volontaire dans la collecte des données, en attendant des services d’incendie qu’ils participent à la rédaction des rapports sur le mode déclaratif. Cette façon de procéder est un atout dans l’adhésion et l’engagement qu’il suscite des services, mais aussi un inconvénient. Car toute non-déclaration d’un événement, voire tout formulaire mal complété, conduit nécessairement à un biais dans les statistiques.
De manière générale, les préconisations s’intéressent à la terminologie employée, à la méthode idéale et aux précautions à prendre en matière de système de collecte des données afin d’obtenir des statistiques significatives et robustes, qui durent dans le temps.
La charge financière et les ressources nécessaires pour la mise en place de tels systèmes de collecte au sein de pays sensiblement distincts sont aussi évoquées, de même que les plans de contrôle de la qualité des données et des procédures de leur traitement.
Incendie, proposition de définition
Dans le rapport, la définition d’un événement qualifié d’incendie est ainsi libellée : « incendies de bâtiments pour lesquels le service d’incendie s’est rendu sur les lieux, a confirmé qu’un incendie était en cours ou avait été éteint, et a entraîné des dommages aux personnes, aux biens ou à l’environnement ».
Le feu est considéré comme « une combustion incontrôlée, autoportante, enflammée, incandescente ou fumante ». Les explosions, les éclairs et les décharges d’électricité statique, les tentatives de suicide et les suicides par auto-immolation sont donc exclus, sauf si l’événement a entraîné un incendie après l’événement initial.
Les variables essentielles…
Les recommandations font état de 13 variables essentielles à collecter par les États membres. Elles recouvrent les données factuelles de l’événement, le bilan humain, les caractéristiques des bâtiments et les éléments descriptifs du feu.
Huit variables sont à collecter en priorité (une partie d’entre elles est déjà récoltée dans une grande majorité de pays) :
- nombre de décès ;
- nombre de blessés ;
- âge des personnes décédées ;
- facteur de causalité principale ;
- type de bâtiment ;
- lieu de l’événement ;
- date de l’événement ;
- heure de l’événement ;
Une fois que ces données ont été collectées de manière efficace, il est proposé de collecter cinq autres variables dans une 2e étape :
- nombre d’étages ;
- zone d’origine ;
- source de chaleur ;
- objet mis à feu en premier (il s’agir d’une précision de la variable 4 déterminée à l’étape 1) ;
- articles ayant contribué au développement du feu ;
- mesures de sécurité incendie présentes.
… nécessaires, mais insuffisantes pour la décision
Les auteurs du rapport ont tenté dans un second temps de déterminer l’utilité des variables récoltées pour justifier la mise en œuvre de mesures de sécurité incendie par les pouvoirs publics, à l’aide d’une méthode de type coûts-avantages.
L’aspect économique des investissements réalisés au travers de diverses mesures de sécurité incendie, comme l’installation de système d’extinction automatique ou l’installation de détecteurs de fumée, se prête plutôt bien à cette méthode. Schématiquement, la rentabilité du coût d’installation de tels équipements dans les bâtiments est mise en balance par les pertes évitées si un incendie s’y déclarait, la fréquence et la gravité des données statistiques contribuant à éclairer les choix.
Par contre, le bénéfice de la réduction du risque et le coût de mise en œuvre et du maintien d’une mesure de sécurité incendie sont plus difficilement appréhendables à l’aide des données brutes récoltées.
Hormis l’aspect de la rentabilité économique, comment estimer plus largement par exemple les coûts-bénéfices d’une campagne de prévention ? La décision finale ne pourra pas faire l’économie d’une étude plus poussée et plus qualitative que ce premier niveau de statistiques, nécessitant notamment la recherche d’autres données que les treize variables préconisées par les auteurs.
Organisme officiel et normalisation
Quelle est la suite envisagée pour le projet FireStat ? L’enquête menée auprès des États membres a montré qu’au moins 19 pays étaient favorables à la fourniture de statistiques harmonisées sur les incendies pour une collecte au niveau européen.
Si une expérimentation avec un certain nombre d’Etats intéressés semble être une suite logique au projet FireStat, le rapport pointe également la nécessité de passer par la désignation ou la création d’une instance européenne chargée de superviser la collecte et la publication des statistiques, ainsi que par la normalisation via un organisme officiel des définitions et méthodologies proposées.
Bernard Jaguenaud – Rédacteur en chef
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