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Explosion d’un silo à Metz, il y a 40 ans
Le 18 octobre 1982, deux explosions consécutives se produisent à la Malterie de la Moselle à Metz faisant 12 morts et des dégâts considérables.
Il est 14 h 14 le 18 octobre 1982, lorsqu’une première explosion puis une seconde retentissent à la Malterie de la Moselle à Metz. Elles sont suivies d’un important panache de fumée qui s’élève au-dessus de l’établissement qui transforme l’orge en malt pour l’industrie de la brasserie.
Sur les quatorze cylindres en béton armé disposés en trois rangs formant le silo – chacun mesurant 7 mètres de diamètre et 43 m de haut –, huit s’écroulent. Tout comme la tour de manutention de 10 étages (62 mètres), reliée aux cylindres, dans laquelle sont répartis épurateurs, ventilateurs, vibreurs, presses, ensacheuses… Elle s’abat en partie sur la voie de chemin de fer toute proche.
Dès lors, 11 000 tonnes de grains se déversent dans l’amas de décombres de béton et de métal. En outre, des débris ont été projetés à plus de 250 mètres, jusqu’à l’autoroute. Elle sera fermée à la circulation pendant trente minutes.
Les six cylindres restés debout sont fortement fissurés et instables.
Des travaux en cours
La Malterie de la Moselle est implantée depuis 1974 dans le nouveau port de Metz.
Au moment de l’accident, des travaux de maintenance sont en cours, notamment pour améliorer le dépoussiérage et la ventilation du silo. Ils sont réalisés par trois entreprises extérieures. Treize personnes sont présentes sur les lieux au moment des explosions.
Les secours
La tâche des secours est immense. « Il est impossible de s’enfoncer dans les décombres sans auparavant découper au chalumeau les armatures de béton », écrit René Dosne dans Face au Risque (n° 190, février 1983).
Quelques heures après les explosions, un survivant est dégagé, gravement blessé.
Des moyens énormes en matériel sont dépêchés : des pelles mécaniques, un bulldozer, des marteaux piqueurs. Et deux puissantes grues qui arrivent de Strasbourg et d’Allemagne pour soulever les énormes dalles.
Côté sauveteurs, jusqu’à 600 personnes sont mobilisées : pompiers, militaires, policiers, équipes cynophiles, mineurs-sauveteurs des Houillères de Lorraine, géomètres (pour prévenir les risques d’effondrement des cylindres restés debout), hommes-grenouilles (pour reconnaître les sous-sols emplis d’eau)…
Finalement, douze corps sans vie sont retrouvés au fil des jours. Le dernier est dégagé cinq jours après l’accident.
Deux grues de 150 et 300 tonnes permettent de dégager les blocs de béton armé. Crédit : Archives Face au Risque
Les poussières
Dans ce type d’installation, les poussières sont l’ennemi numéro un. En effet, elles peuvent s’enflammer ou exploser au contact d’une source de chaleur : court-circuit, étincelle, échauffement d’un appareil, chute de mégot, travaux par point chaud… « On a découvert dans les décombres, près d’un corps, un brûleur de chalumeau, une bouteille d’oxygène et 50 cm de tuyau de caoutchouc », relate René Dosne dans son article.
L’enquête a relevé un important empoussièrement du site, note le Barpi dans la fiche Aria n° 8781.
Et le personnel était très peu sensibilisé au risque incendie : pas de consigne pour les travaux, pas de permis de feu…
La première explosion dans la tour est probablement liée aux travaux dans une atmosphère explosive. Ce qui a entraîné un soulèvement de poussières provoquant la seconde explosion, plus puissante.
Dommage collatéral
Les déchets d’orge et de malt ont été irrégulièrement mis en décharge dans une ancienne gravière. Ceci a provoqué une pollution de la Moselle. Il a alors fallu aérer les eaux de la gravière et évacuer les 12 500 m³ de céréales après asséchement vers un centre de stockage autorisé.
Les suites
Selon le Barpi, le rapport du 7 février 1983 de l’inspection diligentée par le ministre de l’Environnement « met l’accent sur la nécessité de réduire l’empoussièrement (…), d’améliorer les procédures d’exploitation et d’entretien » et d’agir « sur la conception des installations (évents de surpression, découplage tour/cellule) ».
Le 11 août 1983, une instruction technique relative aux silos est publiée. Deux ans après, en 1985, les silos sont introduits dans la nomenclature des ICPE (rubrique 2160).
Le 15 juillet 1991, le directeur de l’établissement est condamné par le tribunal de grande instance de Metz à six mois de prison avec sursis et 20 000 F d’amende pour homicides et blessures involontaires.
La réglementation Atex (atmosphère explosive)
Depuis, la réglementation en matière de prévention des risques d’explosion a évolué. Elle s’appuie aujourd’hui sur deux directives européennes :
- directive 1999/92/CE du 16 décembre 1999 relative à la sécurité des travailleurs exposés au risque Atex ;
- directive 2014/34/UE du 26 février 2014 relative aux appareils et aux systèmes de protection à utiliser dans les zones Atex.
Dans les faits, le chef d’entreprise doit effectuer une évaluation du risque d’explosion, classer les lieux de travail à risques par zone (zonage Atex) et rédiger et mettre à jour le Document relatif à la protection contre les explosions (DRPCE) annexé au Document unique.
Lorsqu’une zone est classée Atex, le chef d’entreprise doit mettre en place les mesures organisationnelles et les équipements techniques adaptés (cf. Face au Risque n° 560, mars 2020).
Article extrait du n° 586 de Face au Risque : « La réglementation incendie en reconstruction » (octobre 2022).
Martine Porez – Journaliste
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