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Accident ferroviaire sous le tunnel de Vierzy, il y a 50 ans
Le 16 juin 1972, deux autorails circulant en sens opposé à plus de 100 km/heure percutent, dans un tunnel de l’Aisne, une masse d’éboulis provenant de l’effondrement de la voute. L’accident fait 108 morts et 111 blessés.
Il est 20 h 54 ce vendredi 16 juin 1972 lorsqu’un autorail reliant Paris à Laon entre dans le tunnel à double voies de Vierzy (Aisne).
Or, à la suite du passage d’une locomotive une demi-heure plus tôt, une partie de la voute du tunnel – environ 15 m de longueur – s’est effondrée. Cet éboulement a formé une masse de 460 m³ de 5 m de haut au-dessus du niveau du rail. Le train percute cet éboulis rocheux à 108 km/h, l’escalade et s’encastre dans ce qui reste de la voûte. Les trois wagons de tête s’empilent les uns dans les autres.
Une minute s’écoule quand un train arrivant en sens inverse sur l’autre voie heurte lui aussi l’éboulis et s’imbrique dans les wagons renversés du premier train.
L’arrivée des secours en plusieurs étapes
L’alerte est donnée près de 20 minutes plus tard. Huit pompiers volontaires d’Hartennes-et-Taux, bourgade située à quelques kilomètres de là, arrivent sur les lieux. Ils découvrent un enchevêtrement de wagons broyés et de ferraille, laissant supposer un grand nombre de victimes. Mais ils n’ont pas les outils adéquats pour intervenir efficacement.
Le plan Orsec est déclenché à 22 h. Et ce n’est que vers 1 h du matin que le régiment de Soissons arrive avec du matériel. Les sapeurs-pompiers de Paris viennent eux aussi avec hommes et matériel quelques heures plus tard. Ils installent notamment des systèmes de ventilation pour aérer le tunnel dans lequel la chaleur est étouffante.
Pendant trois jours, jusqu’à 500 sauveteurs se relaient pour extraire des décombres les blessés mais aussi de nombreux corps sans vie. Leur tâche est compliquée par le risque toujours présent d’éboulement de la voute, qu’il a fallu étayer, et par l’exiguïté de l’espace. Mais elle l’est aussi par les très nombreux badauds présents, gênant le déroulement des opérations.
Les deux derniers survivants sont extraits 40 heures après l’accident. Le 19 juin, il n’y a plus d’espoir de retrouver des personnes vivantes. Au total, l’accident a fait 108 morts et 111 blessés.
L’évacuation des morts et des blessés.
Crédit : Capture Ina
Les circonstances de l’accident
Ce tunnel, long de 1 390 m, a été mis en service en 1862. En 1914, devant l’avancée allemande, il a été volontairement dynamité par l’armée française. Mais ceci a provoqué l’affaissement de la couverture calcaire et a fragilisé, à la longue, la portance de la voûte.
Le tunnel était en travaux depuis quelques semaines avant l’accident. En effet, la SNCF avait constaté des fissures dans la voute et la chute de briques qui constituaient son parement. Les travaux, réalisés par l’entreprise Cofriso, consistaient à remplacer, dans les zones dégradées, le revêtement de briques par du béton projeté.
Les expertises menées après le drame démontreront que l’effondrement de la voute était lié aux travaux en cours mais également à plusieurs défauts du tunnel : usage de moellons de faible résistance et vieillissement des matériaux.
La stèle commémorative installée au dessus du tunnel avec les noms et âges des 108 morts dont près de la moitié avait entre 9 et 25 ans.
Crédit : DR
Les responsabilités
Le procès s’est déroulé au tribunal correctionnel de Soissons du 23 février au 4 mars 1976.
Neuf personnes (dont huit de la SNCF et une de l’entreprise Cofriso), jugées responsables de la catastrophe, étaient inculpées d’homicides et blessures involontaires. Cinq d’entre elles ont été condamnées à des peines de 6 et 18 mois de prison avec sursis.
La SNCF a été déclarée civilement responsable pour les dommages causés. En revanche, la responsabilité de la société Cofriso a été écartée, le tribunal estimant qu’elle n’était « qu’un simple exécutant ».
Quelques mois plus tard, en février 1977, la cour d’appel infirme en partie ce jugement et ne condamne que trois personnes de la SNCF à 8 mois de prison avec sursis.
Les suites de la catastrophe
À la suite de cet accident, l’un des plus meurtriers de l’histoire ferroviaire française, une importante campagne de contrôle et de rénovation de ce type de tunnel est entreprise.
Après réfection complète, le tunnel de Vierzy est mis en voie unique. Ce qui sera aussi le cas de tous ces types de tunnels construits dans le nord et l’est de la France.
Après le drame, le tunnel de Vierzy a été mis en voie unique. Crédit : Geralix-Wikimedia-commons
Des wagons d’inspection des tunnels (WIT) ont été mis au point après cet accident. Leur toit en plateforme ainsi qu’une nacelle au bout d’un bras élévateur permettent d’inspecter les voûtes au plus près.
La surveillance des tunnels ferroviaires aujourd’hui
SNCF Réseau compte 1 435 tunnels en service, dont la majorité a plus d’un siècle d’existence. La surveillance des ouvrages d’art du réseau (ponts, tunnels, passerelles) comporte quatre niveaux :
- une surveillance courante effectuée par tous les acteurs ferroviaires et par les agents des voies ;
- des visites d’inspections détaillées par cycles de 3, 6 ou 9 ans selon le type de l’ouvrage, sa date de construction et la fréquentation de la ligne ;
- une surveillance renforcée si nécessaire, selon l’ouvrage ;
- des surveillances particulières en cas d’événements climatiques (crues, intempéries, grands froids…).
Si les wagons d’inspection existent toujours, les drones ont aujourd’hui fait leur apparition dans la surveillance des ouvrages.
Article extrait du n° 583 de Face au Risque : « OVH, Quelles leçons ? » (juin 2022).
Martine Porez – Journaliste
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