IRSST : 40 ans au service de la santé et sécurité au travail
L’Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail (IRSST), implanté au Québec depuis 1980, mène et finance des recherches pour diminuer les risques d’atteinte à la santé et à la sécurité des travailleurs et pour favoriser leur réadaptation. Rencontre avec Lyne Sauvageau, présidente-directrice générale de l’IRSST.
Pouvez-vous nous présenter l’IRSST et ses principales missions ?
Lyne Sauvageau. L’Institut est un organisme paritaire privé, financé en majeure partie par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST). Il compte 145 employés qui s’attachent à contribuer, par la recherche, à la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles, ainsi qu’à la réadaptation des travailleurs qui en sont victimes. Pour cela, nous disposons de quatre grands leviers :
- Le centre de recherche, qui compte 80 chercheurs, professionnels et techniciens appartenant à des disciplines variées et qui travaillent sur les risques chimiques et biologiques, les risques mécaniques et physiques, la prévention durable en SST et environnement de travail et la réadaptation au travail.
- Le financement d’études réalisées dans des universités québécoises et des centres de recherche publics.
- Les services de laboratoires, qui offrent des analyses environnementales, toxicologiques et microbiologiques ainsi que le prêt et l’étalonnage d’instruments nécessaires à la prévention des maladies professionnelles.
- Le transfert de connaissances vers les milieux de travail.
L’IRSST, en 40 ans, c’est :
L’IRSST existe depuis quatre décennies, quelles sont les évolutions notables ces dernières années en santé et sécurité au travail ?
L. S. Nous avons observé des améliorations importantes, notamment avec la baisse continue des accidents du travail. En revanche, on voit la remontée des maladies professionnelles, pour lesquelles les temps d’exposition sont plus longs avant de produire des effets.
Il y a aussi les risques dont on n’arrive pas complètement à limiter la récurrence même s’ils diminuent, comme les TMS, les chutes, les coupures.
De nouveaux risques sont également apparus, comme la question des nanoparticules, et de vieux risques prennent de nouvelles formes. On sait par exemple qu’un certain nombre de contaminants, comme les métaux lourds, refont leur apparition avec les emplois verts.
Et évidemment, nous ne pouvons passer sous silence l’impact de la Covid-19. Nous pensions avoir sous contrôle les risques de nature biologique mais la pandémie nous a prouvé qu’on n’est pas à l’abri de choses qu’on estime bien connaître. Nous devons redevenir humbles et rehausser notre niveau de vigilance. Au tout début de la pandémie, nous avons lancé un appel à la communauté de chercheurs pour développer des connaissances liées à la Covid : désinfection des masques, stress, télétravail… Trois demi-journées, du 13 au 15 septembre 2021, seront dédiées à la restitution des résultats.
Quels sont, d’après vous, les enjeux des années à venir en santé et sécurité au travail ?
L. S. La Covid va être un sujet de connaissance important dans les années qui viennent. La nécessaire humilité devant les risques, c’est quelque chose qu’on devra garder en mémoire pour être à l’affût des transformations des milieux de travail et des enjeux. La pandémie a aussi montré qu’il faut maintenir une large diversité d’expertises pour pouvoir faire face en temps de crise.
« Maintenir des compétences diverses est parfois un défi, car on a tendance à vouloir répondre aux enjeux du moment. »
Au Québec, aucun laboratoire n’était compétent pour tester les masques. On a capitalisé sur des travaux qui avaient été faits entre 2012 et 2014 par un chercheur de l’IRSST sur la norme NIOSH [NDLR : organisme chargé d’homologuer les masques et autres appareils respiratoires aux États-Unis] pour monter très rapidement un banc d’essais et tester les masques qui arrivaient sur le territoire. On a vu l’importance d’avoir des gens qualifiés sur un large spectre de domaines. Maintenir ces compétences diverses est parfois un défi, car on a tendance à vouloir répondre aux enjeux du moment. Il faut avoir un certain recul.
D’autres sujets nous semblent par ailleurs primordiaux comme :
- la santé psychologique,
- les nanoparticules,
- la question de la diversité des travailleurs et des populations vulnérables (les jeunes, les populations vieillissantes, les immigrants),
- les maladies professionnelles (cancers, maladies neurologiques avec la question des pesticides, la surdité professionnelle).
Dans les enjeux, il y a aussi les nouvelles technologies et les nouvelles réalités du travail avec par exemple les robots et cobots. On a notamment des liens avec des collègues français sur la question des exosquelettes. La France est pour nous un collaborateur naturel et privilégié. Les collaborations sont essentielles en recherche pour continuer à bien servir nos milieux de travail.
Article extrait du n° 574 de Face au Risque : « L’hydrogène en lumière » (juillet-août 2021).
Gaëlle Carcaly – Journaliste
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