Plan de prévention et protocole d’accueil mais absence de consignes
Le plan de prévention des risques et le protocole d’accueil n’exonèrent pas l’employeur de son devoir de porter à la connaissance des salariés des consignes claires de sécurité.
La conscience du danger
Un salarié de la société C., a été victime d’un accident en étant percuté par un chariot élévateur. L’événement ayant été pris en charge au titre de la législation professionnelle, il a saisi ensuite la juridiction compétente d’une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur. Condamnée à réparer, la société C. a alors saisi jusqu’à la Cour de cassation.
Ce que dit la Cour de cassation
Cependant, la Haute Juridiction considère ici que :
« 4. L’arrêt relève que la victime, qui venait de stationner [le camion qu’elle conduisait] dans la cour des établissements K., sur l’aire prévue à cet effet (…) a été percutée, alors qu’elle se dirigeait vers l’accueil sans emprunter les voies de circulation prévues, par un chariot élévateur circulant lui-même dans une zone non autorisée pour ce type d’engins.
5. Il retient que l’une des causes de l’accident réside dans le fait pour la victime d’avoir choisi une trajectoire directe pour se rendre vers l’accueil de l’établissement sans emprunter les passages prévus à cet effet et que l’employeur ne saurait alléguer qu’il n’avait pas conscience du danger auquel avait été ainsi exposé son salarié dès lors qu’il avait signé un protocole d’accueil clients avec les établissements K, comprenant un ensemble de consignes liées aux déplacements au sein de ceux-ci, contraintes liées à la coexistence de différentes composantes de déplacement (piétons, chariots élévateurs, poids lourds) et dangers que ces tâches recélaient (chargements, déplacements), ainsi qu’un plan de circulation permettant de mettre en évidence et de visualiser des zones de circulation piétons.
6. Il ajoute que si l’employeur fait état de plan de prévention des risques, ou encore d’actions de formation du salarié, les pièces produites ne permettent nullement d’établir que le protocole d’accueil susmentionné, signé pour le compte de l’employeur par un responsable et qui fait mention du salarié, ait été effectivement porté à la connaissance de ce dernier et que les consignes y figurant lui aient été rappelées.
7. De ces constatations et énonciations, procédant de son appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve débattus devant elle, dont elle a fait ressortir que l’employeur avait conscience du danger auquel était exposée la victime et qu’il n’avait pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de s’expliquer sur les éléments de preuve qu’elle décidait d’écarter, a pu déduire que l’employeur avait commis une faute inexcusable (…). »
Partant, le pourvoi de l’employeur est rejeté.
Défaut de prévention de l’employeur
En résumé, un salarié, circulant en dehors des voies de circulation organisées sur une aire de stationnement, a été percuté par un chariot élévateur qui n’avait pas non plus à s’y trouver. Les premiers magistrats saisis ont considéré que la victime était fautive, mais que son agissement n’était pas la cause exclusive et déterminante de son accident. En corollaire, relevant que l’employeur avait notamment élaboré un plan de prévention des risques, ils ont d’abord caractérisé sa conscience du danger, lequel était pour l’essentiel le fruit de « contraintes liées à la coexistence de différentes composantes de déplacement (piétons, chariots élévateurs, poids lourds) et dangers que ces tâches recélaient (chargements, déplacements) ».
Ensuite, ils ont décidé que les mesures concrètes de prévention n’avaient pas été effectives. En effet, la preuve de la connaissance, par le salarié blessé, des documents d’information afférents au risque n’était pas rapportée ici.
Dès lors, la Haute Juridiction refuse d’examiner à nouveau ces éléments factuels, car elle n’est compétente que pour les questions relatives à la bonne application du Droit.
En conclusion
En présence d’une faute de la victime mais également d’un défaut de prévention de l’employeur conscient d’un danger, la faute inexcusable de ce dernier est bien caractérisée, conformément à la jurisprudence habituelle en la matière.
Extrait de l’article du n° 573 de Face au Risque : « ERP et Covid-19, l’impact sur la sécurité – sûreté » (juin 2021).
Virginie Perinetti
Avocate au Barreau de Paris depuis 2004
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