Explosion à l’usine Lubrizol : le point sur l’incendie d’un site classé Seveso seuil haut
Un incendie s’est déclaré au sein de l’usine Lubrizol (près de Rouen) peu après 2h00 dans la nuit du mercredi 25 au jeudi 26 septembre 2019. Les risques de toxicité sont avérés sur ce site classé Seveso… l’intitulé choisi pour répertorier les sites industriels présentant des risques d’accidents majeurs.
Vers 2h40 dans la nuit du mercredi 25 au jeudi 26 septembre 2019, un incendie, entraînant de fortes détonations, s’est déclaré sur le site de l’usine Lubrizol de Rouen (spécialisée dans la conception d’additifs pour des lubrifiants). Pas moins de 150 sapeurs-pompiers et 60 engins sont mobilisés ces dernières heures selon une information relayée par LCI.
Les premières recommandations
Le confinement des habitants a immédiatement été recommandé par les autorités. La fermeture d’établissements recevant du public (parmi lesquels figurent les établissements scolaires), à Rouen et au sein de douze autres communes alentours, a également été demandée par la préfecture.
Que retenir du point presse de la matinée ?
Un premier point presse, auquel notre journaliste Gaëlle Carcaly a assisté, s’est tenu à 10 h ce jeudi matin. Le colonel Jean-Yves Lagalle, directeur du Sdis76, faisait office d’interlocuteur principal durant cette conférence. On retient de ce point presse que :
- Les sapeurs-pompiers ont comme mission principale de protéger les installations sensibles qui sont susceptibles d’exploser en cas de propagation du feu. Ils laissent ainsi brûler ce qui alimente actuellement le feu, à savoir les huiles et hydrocarbures. De fait, on remarque toujours sur place en cette fin de matinée la présence marquante d’énormément de fumées noires et grasses.
- Autre information dévoilée à l’occasion de ce point presse : les fumées sont inéluctablement toxiques… Il ne s’agit cependant pas de toxicité aiguë. Pour rappel, ce type de toxicité impliquerait des suites mortelles à la simple inhalation des fumées.
- Si le risque de toxicité aiguë est écarté, le risque de toxicité chronique (présence d’un individu dans les fumées pendant plusieurs heures) est bel et bien présent. De fait, les intervenants ont pour ordre de s’exposer le moins longtemps aux fumées et de reculer en cas de risque.
- À noter enfin qu’un risque de pollution de la Seine a été évoqué, en raison du fait que les bassins de rétention de l’usine Lubrizol ne sont pas loin de déborder.
#incendie #lubrizol on attend l’arrivée du ministre de l’Interieur au point de rassemblement des moyens de secours pic.twitter.com/4ojmiRpICb
— Gaëlle Carcaly (@_Ga_L) September 26, 2019
Quelles suites sont attendues ?
Suite à ce point presse, une source sûre nous a par ailleurs fait savoir que les pompiers de Rouen disposaient de mousse dans la matinée, mais pas en quantité suffisante pour assurer la temporisation. Ils ont ainsi préféré attendre les renforts, venus de Paris, pour avoir le bon dimensionnement en mousse. Ces renforts sont arrivés aux alentours de 12h00.
Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur, est quant à lui arrivé sur place en fin de matinée.
Du nouveau en début d’après-midi
Peu après 12h30, le feu était annoncé comme « maîtrisé ».
Les fumées perdent désormais en intensité et deviennent grises.
Le feu officiellement éteint
L’annonce a officiellement été transmise par le préfet de la Seine-Maritime via Twitter : l’incendie de Lubrizol était ainsi définitivement éteint à 20h14 le jeudi 26 septembre 2019.
Une autre information majeure a par ailleurs été transmise à travers ce même tweet : le risque d’odeur après extinction de l’incendie. Les fortes odeurs dégagées par cet incendie étaient d’ailleurs présentes quasiment dès les premiers instants de l’incident.
D’autres recommandations en date du vendredi 26 septembre…
Le préfet de la Seine-Maritime a par ailleurs transmis d’autres recommandations ce vendredi matin. Par le biais d’un communiqué officiel, il a ainsi été demandé de suivre des consignes de nettoyage précises « en cas de présence de suies ». « Comme pour tous résidus de combustion et de produits pouvant être irritants, il convient d’adopter les gestes de précaution habituellement recommandés », précise ainsi ce communiqué.
Les recommandations en question sont les suivantes :
- Éviter tout contact cutané.
- Nettoyer les locaux, fenêtres, mobiliers et jeux extérieurs et les abords (préaux, cours…) uniquement à l’eau.
- Ne pas utiliser de nettoyeur haute pression pouvant mettre en suspension des particules.
- Ne pas effectuer de balayage à sec.
- Lors du nettoyage, protéger sa peau par le port de gants de ménage.
- Ne pas utiliser d’aspirateur.
- Ne pas consommer les végétaux souillés par les suies et se laver les mains en cas de contact.
D’autres régions inquiétées par les fumées de Lubrizol dès jeudi
Qui dit fumées, dit inéluctablement risque de déplacement de la pollution par la force du vent.
Dès jeudi après-midi, les odeurs de pollution de l’incendie de Lubrizol se faisaient ainsi ressentir dans le Nord et la Picardie.
« Portées par des vents dominants, des fumées diffuses très odorantes – mais sans risque pour la population – traversent actuellement le département », ont notamment annoncé les préfectures de la Somme et de l’Aisne par communiqué dans l’après-midi du jeudi 25 septembre.
Les premières conséquences sur l’environnement avérées
Comme cela était craint dès les premières propagations de fumées, l’impact de l’incendie de Lubrizol ne sera pas sans conséquence pour l’environnement. Des galettes d’hydrocarbures ont notamment été découvertes sur la Seine à Rouen.
Une annonce officielle a ainsi été faite par Benoît Lemaire – directeur de cabinet du préfet de Normandie – ce vendredi après-midi.
« Nous sommes en train d’armer un navire pour récupérer les galettes avec un chalut tampon, fait pour ramasser les hydrocarbures (…). Il n’y en a pas des tonnes à mon avis, mais cela nécessite qu’on les récupère. On a demandé que ce soit fait ce (vendredi) après-midi. »
a déclaré l’intéressé à travers des propos repris par LCI.
À noter que Pierre-André Durand, préfet de Seine-Maritime, a confié ce vendredi qu’aucun produit radioactif présent sur le site n’avait été touché par l’incendie. Une déclaration qui confirme les récents propos du colonel Jean-Yves Lagalle, directeur du Sdis76.
« Les éléments radioactifs de l’usine servent à jauger les bacs. Ce sont des sources scellées, et aucune d’elles n’a été touchée par l’incendie. On a fait une levée de doute. On en a eu confirmation », déclarait en amont le colonel Lagalle ces dernières heures face aux médias.
L’origine de cet incendie reste toujours inconnue dans l’après-midi de ce vendredi 27 septembre 2019.
Réouverture des établissements scolaires et manifestation
« À cette heure, tous les sites scolaires seront en mesure d’accueillir les élèves lundi matin », annonçait le rectorat de Seine-Maritime dimanche soir à 18h30. Celui-ci précisait par ailleurs que l’ensemble des établissements scolaires, fermés les jeudi 26 et vendredi 27 septembre 2019, avaient fait le nécessaire en termes de «nettoyage recommandé » avant de recevoir cette autorisation.
Quelques heures plus tard, Christine Gavini-Chevet (rectrice de Normandie) confiait que tous les établissements n’avaient pas effectué ce fameux nettoyage. Ces établissements ont ainsi vu leurs portes fermées ce lundi, en attendant que le nécessaire soit fait.
Concernant la suite des événements sur Rouen, une manifestation est prévue pour le mardi 1er octobre. Le rendez-vous est fixé à 18h devant le palais de justice de Rouen, avant de terminer devant la préfecture. Son but est que la liste intégrale des produits qui ont brûlé soit divulguée. De même que les résultats d’analyses des fumées, de l’air, de l’eau et des résidus.
L’ombre de Lubrizol plane déjà au-dessus des Pays-Bas
Concernant les résidus et les fumées, le nuage poursuit sa progression. Après avoir traversé la Belgique tout au long du weekend, il était au-dessus des Pays-Bas dès la journée du dimanche 29 septembre relaie France Info.
Le centre de crise de Wallonie confiait par ailleurs publiquement ce weekend que le nuage avait très rapidement touché la Belgique… seulement « 5 à 6 heures après le début de l’incendie » d’après cette source.
À noter que, depuis dimanche soir, 112 communes des Hauts-de-France (essentiellement dans l’Oise, la Somme et l’Aisne) ont désormais l’interdiction à titre conservatoire de récolter des cultures et des denrées alimentaires d’origine animale, en raison de suspicions de contamination liée aux retombées des fumées. Cette mesure avait d’ores et déjà été prise en amont pour de nombreuses communes ayant été traversées ou à proximité du nuage de fumées.
Usine fermée jusqu’à nouvel ordre
Dans la matinée du lundi 30 septembre 2019, Élisabeth Borne, ministre de la Transition écologique et solidaire, a confié – sur les ondes de RTL – que l’usine Lubrizol de Rouen resterait fermée jusqu’à ce qu’une explication sur
Est-ce que quelqu'un d'autre dans #Lille sud a des traces sur sa fenêtre ? Mon velux ce matin est bien touché mais je n'ai entendu personne d'autre en parler à Lille...#lubrizolrouen #Lubrizol pic.twitter.com/MKdqMEIYb9
— Anji (@anjipm) 28 septembre 2019
les causes de l’incendie soit trouvée. Des relevés complémentaires sur les traces de suies sont également attendus pour mardi a précisé l’intéressée.
Des policiers malades selon un syndicat
Le syndicat Alternative Police a publié un communiqué dans l’après-midi de ce lundi 30 septembre 2019.
4 jours après l’incendie du site Lubrizol, cette organisation a ainsi fait savoir à travers ce communiqué que plusieurs de ses membres présents sur place dans les minutes qui ont suivi l’incendie étaient aujourd’hui malades.
« Plusieurs policiers affectés à la brigade de nuit et à la compagnie départementale d’intervention de Rouen, primo-intervenants sur l’incendie dès 2h30 du matin, sont actuellement en arrêt maladie pour des nausées, vomissements et vertiges », est-il ainsi rapporté sur le site du syndicat.
Un départ de feu à l’extérieur du site ?
Lundi 30 septembre 2019, Lubrizol a indiqué disposer d’images de vidéosurveillance et de témoignages laissant penser que le feu aurait démarré en dehors des limites de propriétés du site. L’entreprise a déposé plainte pour “destruction involontaire par explosion ou incendie par violation manifestement délibérée d’une obligation de sécurité ou de prudence”, a-t-on également appris lundi.
Eitel Mabouong – Journaliste
Gaëlle Carcaly – Journaliste
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