La sécurité des ponts en France : le Sénat réclame un « Plan Marshall »
L’effondrement du pont Morandi à Gênes (Italie) le 14 août 2018, qui a provoqué la mort de 43 personnes, a relancé les débats sur l’état des ponts en France. Une mission d’information sur la sécurité des ponts a été créée au Sénat. Elle a rendu le 27 juin 2019 son rapport d’enquête.
La mission sénatoriale sur l’état des ouvrages d’art en France vient de rendre son rapport. Elle s’est intéressée aux 200 000 à 250 000 ponts routiers du territoire français. Cette fourchette peu précise démontre qu’on ne connaît pas le nombre exact de ponts. Ceci est « révélateur des lacunes de la politique de surveillance et d’entretien des ponts » affirment en préambule les deux rapporteurs Patrick Chaize (groupe Les Républicains) et Michel Dagbert (groupe socialiste).
Qui gère les ponts ?
Ce sont les collectivités territoriales qui gèrent pratiquement tout le réseau routier français. Un pourcentage nettement plus élevé que chez nos voisins européens.
Concernant plus spécifiquement les ponts, 24 000 appartiennent à l’État, 100 000 à 120 000 relèvent des départements (soit 1 100 ponts en moyenne par département) et 80 000 à 100 000 appartiennent aux communes.
Un constat alarmant
L’état des ponts français constitue un enjeu majeur de sécurité pour les usagers. Pourtant, le constat est alarmant. Au moins 25 000 ponts sont en mauvais état structurel et posent des problèmes de sécurité pour les usagers. Ce sont :
- 7 % des ponts gérés par l’État ;
- 8,5 % des ponts gérés par les départements ;
- environ 18 à 20 % des ponts gérés par les communes ou groupements de communes.
Cette dégradation est due au vieillissement du patrimoine. À titre d’exemple, un quart des ponts gérés par l’État (soit 2 800), qui ont été construits après la seconde guerre mondiale dans les années 1950 et 1960, arrivent en « fin de vie ». Ils nécessiteront des moyens importants de remise en état dans les années à venir. « Et environ 0,5 % des ponts départementaux devront être reconstruits dans les cinq ans à venir, soit en moyenne 5 ponts par département », affirme le rapport.
Il souligne par ailleurs un manque d’investissement dans l’entretien du patrimoine en général et de la part des communes et intercommunalités en particulier. Certaines d’entre elles ont même une méconnaissance de l’état de leurs ponts, parfois même de leur nombre. Et elles « se heurtent à d’importantes difficultés financières pour les entretenir ».
Les préconisations de la mission
Dix propositions sont préconisées par la mission sénatoriale parmi lesquelles :
- la mise en place d’un « plan Marshall ». Il porte le montant des moyens consacrés par l’État à l’entretien de ses ouvrages d’art à 120 millions d’euros par an dès 2020. Et il crée un fonds d’aide aux collectivités territoriales de 1,3 milliard d’euros pour dix ans ;
- la création d’outils pour améliorer la connaissance et le suivi des ponts, et la mise en place d’une programmation pluriannuelle des travaux ;
- l’apport d’une offre d’ingénierie aux petites collectivités pour la surveillance et l’entretien de leurs ponts, notamment en mutualisant leur gestion au niveau départemental ou intercommunal.
Selon Patrick Chaize : « L’objectif est que d’ici dix ans, l’état de l’ensemble des ponts routiers français soit connu, ce qui est loin d’être le cas, et que les ponts les plus dégradés aient fait l’objet de travaux de remise en état. Nous considérons qu’il ne faut pas attendre qu’un drame se produise pour augmenter les moyens consacrés aux ponts ».
Martine Porez – Journaliste
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