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Gigantesque feu de parking à Liverpool
Dimanche 31 décembre 2017, un violent incendie ravage la quasi-totalité du parking de l’Echo Arena de Liverpool, tandis que se déroulait le salon international du cheval. 1 000 à 1 400 véhicules ont été emportés dans la fournaise ! Un triste record.
Il est 16 h 42 lorsque les pompiers sont alertés par un témoin direct pour un feu de voiture, au troisième étage du parking de l’Echo Arena à Liverpool (Royaume-Uni) qui en comporte sept. Le premier centre de secours est à moins de 2 km et deux premiers engins-pompes se présentent à 16 h 50.
L’incendie se propage déjà au milieu des alignements de voitures et d’énormes quantités de fumée s’échappent de ses façades ouvertes.
Des renforts sont demandés tandis qu’une soixantaine de chevaux parqués au rez-de-chaussée sont évacués par les organisateurs de la manifestation équestre, des témoins et des sauveteurs.
De nombreux automobilistes abandonnent leurs véhicules dans les allées du parking et s’échappent.
Jusqu’à 85 pompiers engagés
Parti du 3e étage, le feu se développe vers les niveaux supérieurs, tout en descendant vers le deuxième étage.
Progressivement, le feu se développe vers les étages supérieurs, tout en descendant vers le deuxième étage. Huit engins-pompes sont maintenant engagés. De l’extérieur, on peut bientôt voir le feu « couler » entre les dalles de béton et embraser les véhicules des niveaux inférieurs.
Les manifestations équestres au sein de l’Arena, qui se dresse à quelques dizaines de mètres de là, sont interrompues à 17 h 30.
Très vite, il n’est plus possible d’attaquer le feu par l’intérieur et l’attaque se reporte sur les quatre faces extérieures.
La faible distance séparant les deux immeubles d’habitation sur les côtés nord et est oblige les pompiers à concentrer leurs efforts sur ces deux faces. De hautes flammes s’échappant des baies latérales du parking viennent par instants au contact des fenêtres des immeubles. Les occupants sont évacués tandis que des lances-canons établissent des rideaux d’eau, du sol ou depuis des moyens aériens.
La température au cœur du bâtiment est extrême, là où se trouvent notamment les rampes d’accès et où un phénomène de convection s’établit. Bientôt, tous les centres de secours de l’agglomération et de sa périphérie sont engagés. Une vingtaine d’engins-pompes, 85 pompiers trois pompes haut débit dont deux venues de la région (Greater Manchester et Lancashire) sont à l’œuvre.
Le réseau d’incendie public est très sollicité et l’eau est puisée (grâce à des pompes immergées de 6 000 l/m) dans le bassin du port par les unités grande puissance pour compléter le dispositif de lutte.
Plusieurs quartiers sont confinés
Vers 20 h, le parking vibre toujours au rythme des explosions incessantes qui surviennent au cœur des alignements de carcasses.
Sur plus de 70 m de façade et cinq étages, un mur de flammes s’échappe de chaque niveau, où l’on distingue encore la silhouette des centaines de voitures alignées. Dehors, des milliers de témoins, souvent propriétaires de ces véhicules, observent inquiets la progression du feu.
À 23 h, l’attaque se poursuit toujours, un vent soutenu entraînant sur la ville un panache sombre. Des consignes de confinement sont dispensées dans les quartiers exposés, la fumée se révélant plus dérangeante à mesure que l’intensité du feu faiblit et qu’elle retombe au sol.
Dix heures après le début de l’incendie, on perçoit toujours des détonations au sein du parking éclairé de lueurs éparses.
Toute la nuit, la lutte se poursuit, du sol, des bras élévateurs et depuis les escaliers. La stabilité des structures est encore à évaluer et, par sécurité, les équipes ne s’engagent pas sur les dalles où ne subsiste par endroits que le ferraillage.
Quatre chiens indemnes sont extraits de véhicules en terrasse, où des dizaines de voitures n’ont pas brûlé.
Après la destruction de leur véhicule, plusieurs milliers de visiteurs et participants à la manifestation équestre sont à héberger. Croix- Rouge et services municipaux vont s’y employer, ouvrant un centre d’assistance dans un complexe sportif proche et dans un grand hôtel.
L’incendie est éteint le lundi 1er janvier. Il a entraîné la destruction de 1 000 à 1 300 véhicules sur cinq niveaux au moins, et gravement endommagé la structure de l’édifice, soumise plusieurs heures à une température frôlant les 1 000 °C en certaines zones.
Le feu se propage facilement d’un véhicule à l’autre
Le feu est découvert par un premier témoin, dans une des allées du troisième étage.
Il concerne alors l’avant d’un Land Rover. Accompagnée de ses enfants, la mère de famille alerte les secours et prend une photo pour indiquer aux pompiers la localisation du véhicule. Le feu est vif et l’écran de fumée s’étale rapidement.
Plusieurs automobilistes abandonnent leur voiture et rejoignent les escaliers.
La propagation entre véhicules est aisée, ces derniers étant étroitement alignés, sans qu’aucun écran ne se dresse, par rangs continus de 26 véhicules, soit des groupes de 52 voitures distantes de seulement quelques dizaines de centimètres… Chaque rampe située au centre du parking dispose d’une cinquantaine de places en pente, facilitant la propagation par l’écoulement de carburant.
Les dalles des planchers s’effritent et éclatent au fil des heures sous la déformation des ferraillages qui les arment.
Toutefois, les poteaux traversant l’édifice ainsi que les poutres principales d’une portée de 16 m résistent, malgré des atteintes locales. Les poutres de plus faible section les reliant subissent plus de destructions, se brisant parfois.
Les quatre faces sont largement ouvertes sur l’extérieur et ventilent l’ensemble, y compris sur les deux faces distantes respectivement de 4,50 m et 7,50 m les séparant des deux immeubles d’habitation. Ces façades, percées d’une soixantaine de fenêtres chacune, ont souffert du rayonnement et des flammes s’échappant de chaque niveau. Un début de propagation au moins a été relaté.
Attaque du feu depuis l’extérieur du parking
Traditionnellement, les sapeurs-pompiers combattent le feu par l’intérieur au niveau concerné via les escaliers. Ici, bien que nous soyons dans un parking ouvert bien ventilé, fumée et chaleur les obligent dans un premier temps à combattre de l’extérieur à mesure que le feu se généralise. La surface de chaque niveau (près de 5 000 m² dans ce cas) laisse une surface approximative de plus de 1 000 m² hors d’atteinte des lances, en raison du faible espace existant entre les voitures et les plafonds, contrariant la pénétration des jets.
C’est ensuite à mesure que les heures passent que se pose la question de la stabilité de la structure…
Toutefois, il est probable que l’indépendance structurelle des quatre escaliers par rapport au parking ait permis aux sapeurs-pompiers de conserver ces axes d’approche durant l’intervention.
La structure béton a résisté, malgré des brèches du sol par où le feu a pu « s’écouler ».
© Merseyside Fire & Rescue Service.
Les facteurs aggravants
Si, lors d’un incendie de parc de stationnement couvert, l’idée de manœuvre traditionnelle consiste en une attaque privilégiant un tirage intérieur extérieur, en l’appuyant éventuellement par l’emploi de ventilateurs grand débit en extraction au niveau des rampes, ici le tirage naturel s’est instauré à partir de deux paramètres principaux : les conditions météorologiques d’une part (vent fort balayant les étages et attisant le feu), et l’importance de l’énorme masse combustible d’autre part, créant probablement au niveau des rampes centrales un mouvement de convection.
L’approvisionnement en eau, après la sollicitation du réseau traditionnel, a pu être augmenté, via des pompes immergées grand débit, les darses du port se trouvant à moins de 100 m du bâtiment sinistré.
Le rôle des assurances
Le blocage sur Liverpool de plusieurs milliers de visiteurs ou participants à la manifestation a nécessité la mise en place de structures d’accueil par les services communaux, mais a aussi entraîné via les réseaux sociaux des propositions d’écuries pour les chevaux, d’hébergement des sinistrés ou de leur reconduite.
La destruction de plus de 1 000 véhicules en un même endroit est exceptionnelle, voire une première, si l’on excepte l’explosion du port de Tianjin en 2015 et la destruction massive de parcs de véhicules neufs (Face au Risque n° 518, décembre 2015).
Cette situation a entraîné de la part de certaines compagnies d’assurances un renforcement des équipes en cette période de fêtes, afin de répondre au plus vite à l’afflux de déclarations de sinistres. Six jours après l’incendie, 76 % des dossiers d’indemnisation avaient été traités.
Avant que le site ne soit inspecté et éventuellement sécurisé, des drones ont été engagés à l’intérieur par les compagnies d’assurance pour évaluer l’ampleur des dommages.
Elles estiment à environ 20 millions de livres le coût des remboursements aux propriétaires de véhicules, hors dommages au bâtiment.
Le maire de Liverpool, Joe Anderson, a déclaré que, si le parking ne menaçait pas ruine, il était peu probable qu’il puisse être sauvé. Dans ce cas, son démantèlement éventuel et la dépollution, notamment des plus de 1 000 véhicules à l’intérieur, seront longs et complexes. En attendant, le site a dû être gardienné afin d’empêcher les propriétaires de véhicules contenant des biens de valeur et souhaitant les rechercher de s’introduire dans ces lieux dangereux.
« Nous ferons tout notre possible pour essayer de récupérer tous les véhicules et biens qui sont encore viables, mais tout le monde doit comprendre que le parking était un enfer et que la grande majorité des voitures sont complètement incinérées », a encore précisé le maire.
En France, un arrêté datant du 19 décembre 2017, entré en vigueur le 1er janvier 2018, modifie certaines dispositions du règlement de sécurité contre les risques d’incendie et de panique dans les ERP de type PS (parcs de stationnement couverts).
Les restrictions budgétaires ont réduit les moyens de lutte
Dans un autre registre, il a par ailleurs souligné que des compressions budgétaires avaient entraîné la disparition de moyens humains et matériels dans les services incendie, affirmant que huit engins-pompes auraient pu se présenter au lieu de deux… Auraient-ils fait la différence ?
Pour le chef des services d’incendie, les compressions budgétaires signifient que les gros sinistres représentent d’énormes défis et que, dans ce cas, il est nécessaire de s’appuyer sur les services incendie voisins.
Confirmant sa subtilité dans les instants critiques, l’humour britannique n’est jamais bien loin. À un témoin qui, au cours de l’incendie, demandait à un pompier s’il devait s’inquiéter pour sa voiture, celui-ci aurait répondu :
« – Où était votre voiture ?
– Au sixième…
– Eh bien vous feriez mieux d’aller boire quelques verres pour fêter la nouvelle année, car vous ne la reverrez pas, votre voiture ! »
René Dosne
Lieutenant-colonel (rc), créateur du croquis opérationnel à la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris
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